Publication du plan « France Relance », quel soutien réel pour le secteur de l’immobilier ?

En réponse à la crise sanitaire de la Covid-19 qui frappe le pays depuis plusieurs mois, le Premier ministre Jean Castex a présenté jeudi 3 septembre en Conseil des ministres son plan de relance de 100 milliards d’euros baptisé « France Relance ». Ce plan s’organise autour de 3 grands axes : l’écologie, la compétitivité et la cohésion sociale et territoriale. Près d’un tiers du budget sera affecté à la transition écologique, dont 6,7 milliards d’euros destinés à la seule rénovation énergétique des bâtiments publics comme privés, ainsi privilégiée pour des raisons économiques. Dommage que ce soit le principal axe choisi, car il est générateur d’énergie grise et d’émissions de GES…

 

Un renforcement du dispositif d’aide à la rénovation des bâtiments privés, MaPrimeRenov

Tout d’abord, côté privé, le dispositif MaPrimeRenov’, précédemment doté d’environ 500 millions d’euros, est réhaussé de 2 milliards d’euros sur 2021-2022.  C’est dire si le dispositif doit changer d’échelle et être le fer de lance de la rénovation énergétique pour les ménages !

La plateforme est ouverte depuis le 2 janvier 2020 et remplace le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE). Elle vise à simplifier l’accès à des aides à la rénovation énergétique et diminuer les délais : le nouveau dispositif prévoit un versement à la fin des travaux réalisés, et non plus une déduction fiscale à faire valoir l’année suivante. Par ailleurs, les travaux doivent impérativement être réalisés par des entreprises labellisées « Reconnu garant de l’environnement » (RGE).

En complément de la hausse budgétaire, le plan élargit le dispositif à l’ensemble des propriétaires, copropriétés et aux propriétaires bailleurs, sans condition de ressource.  La prime pourra s’échelonner de 2 000 euros à environ 20 000 euros selon Emmanuelle Wargon, Ministre déléguée au Logement, et pourra être cumulée avec d’autres dispositifs existants, dans la limite de 20 000 euros par logement sur cinq ans. Un bonus pourra être prévu pour les passoires thermiques.

 

4 milliards d’euros de budget alloués aux bâtiments publics

L’objectif est de réduire l’empreinte énergétique et environnementale des bâtiments publics et de les adapter au changement climatique, avec une priorité pour les bâtiments d’enseignement supérieur et de recherche. Le budget est destiné à l’ensemble des bâtiments publics comprenant les bâtiments de l’État et ceux des collectivités territoriales. Un premier appel à projets a d’ores et déjà été lancé pour trouver des candidats capables de réaliser des travaux performants et rapides sur le parc public. Les travaux envisagés comprendront trois types d’opérations de rénovation : des travaux rapides, des opérations de gros entretien tel que le changement du système de chauffage et enfin des opérations lourdes comprenant d’autres sujets tel que l’amélioration de l’accessibilité. Les financements devraient permettre la rénovation d’environ 15 millions de m² sur les 100 millions de m² du parc de l’Etat.

Des solutions « industrielles » pour une rénovation énergétique plus performante des logements sociaux

Des subventions seront accordées aux bailleurs sociaux pour une rénovation énergétique de leurs logements permettant à 40 000 d’entre eux d’accéder à des standards plus élevés de performance énergétique.

Le budget pour ces subventions, à hauteur de 500 millions d’euros, comprend 40 millions d’euros destinés à un appel à projet visant à développer des solutions industrielles. Le gouvernement désire faire émerger une filière « industrielle » pour une rénovation énergétique plus performante de type « EnergieSprong », une démarche hollandaise visant à partager et déployer les bonnes pratiques pour rendre un bâtiment existant zéro énergie.

 

Inciter les TPE et PME à répondre aux objectifs du dispositif éco-énergie tertiaire

Enfin, sur les 6,7 milliards du budget de rénovation énergétique, 200 millions d’euros sont destinés à la transition écologique du parc immobilier des entreprises TPE/PME qui représentent 98% des entreprises françaises et la moitié des emplois en France. Avec le dispositif éco-énergie tertiaire – anciennement Décret Tertiaire – les bâtiments de plus de 1000 m2 devront réduire de 40% leurs consommations énergétiques d’ici 2030. Un défi auquel un grand nombre de PME sera soumis.

Comme pour les particuliers, le recours à des entreprises certifiées « Reconnu garant de l’environnement » (RGE) et une assistance à maitrise d’ouvrage seront obligatoires pour s’assurer de la bonne qualité des travaux réalisés.

 

Faire face à l’artificialisation des sols

En parallèle des rénovations énergétiques, une enveloppe financière est prévue afin de valoriser le recyclage des friches et la densification des espaces rentrant dans la démarche « Zéro Artificialisation Nette » (Voir article de l’OID ici) fixée par le gouvernement. Au total, le fond « friches » de 300 millions d’euros devrait permettre la réhabilitation d’environ 900 hectares.

Pour ce qui est de la densification des villes, un dispositif d’aide financé par l’État à hauteur de 350 millions d’euros sur deux ans va être mis en place et se fera à l’aide de l’application « Sitadel2 ». Il est ouvert à toutes les communes, la publication du décret fixant les conditions d’octroi de l’aide étant prévue pour mars 2021.

 

Au final, pour le secteur du bâtiment, France Relance met donc un fort accent sur le volet rénovation énergétique des bâtiments, qui permet de mobiliser des compétences et savoir-faire non délocalisables. De plus, les investissements prévus doivent permettre d’accompagner la mise en place d’un certain nombre de réglementations attendues, telles que le dispositif éco-énergie tertiaire ou l’objectif de zéro artificialisation nette des sols. Toutefois, on peut regretter que ce plan associe presque exclusivement l’enjeu de transition énergétique à la rénovation énergétique : d’une part, parce que ce choix peut au final être contreproductif, en induisant des travaux qui anticipent sur l’obsolescence des équipements et génèrent donc des émissions de GES évitables, d’autre part parce que d’autres axes concernant la réduction des émissions de GES auraient pu y être intégrés, comme les éco-matériaux ou les matériaux biosourcés.

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