A l’heure où de nombreuses réglementations mettent l’accent sur une consommation énergétique maîtrisée, la pertinence des Contrats de Performance Énergétique semble avérée. Comment les acteurs publics et privés se saisissent de ces outils ? Telle est la question posée par l’Observatoire National des CPE (ONCPE) qui a publié ses chiffres-clés 2021.
Les CPE : un dispositif intéressant pour assurer la diminution des consommations énergétiques des bâtiments
Concrètement, en quoi consiste les Contrats de Performance Énergétique (CPE) ? Institués à la suite de la Directive Européenne 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique, il s’agit de contrats à Garantie de Résultats Energétiques (GRE) : ces contrats permettent de sécuriser suite à un investissement une diminution de consommation énergétique, en liant les conditions de rémunération à des obligations de résultats.
Les CPE s’appuient donc sur des mesures objectivables des consommations énergétiques des bâtiments. Les contrats prévoient des intéressements et/ou des pénalités en fonction des résultats obtenus et mesurés.
Ces dernières années, le cadre réglementaire français et européen met l’accent sur la diminution des consommations énergétique du bâtiment. Logique, quand on sait que ce secteur représente en France plus de 40% de la consommation d’énergie du pays.
Ainsi, le Dispositif Eco-Energie Tertiaire fixe des objectifs de réduction de la consommation des bâtiments tertiaires de plus de 1000 m² de 40% d’ici 2030, 50% d’ici 2040 et 60% d’ici 2050. De tels niveaux de réduction des consommations requièrent de mobiliser l’ensemble des leviers possibles dans les bâtiments : sensibiliser les occupants, optimiser la gestion technique et les équipements, voire intervenir sur l’enveloppe du bâti lorsque c’est nécessaire.
Par ailleurs, d’autres contraintes réglementaires vont dans le même sens d’une consommation d’énergie maîtrisée dans les bâtiments : à titre d’exemple, le nouveau DPE logements prévoit des plafonds de consommation énergétique, alors que la loi Climat et Résilience prévoit d’associer certains niveaux de l’étiquette DPE avec le caractère de décence des logements. Enfin, le dispositif européen de taxinomie anticipe notamment pour son critère associé à l’atténuation du changement climatique de plébisciter les actifs dont les DPE sont classés A ou faisant partie du top 15% de leur marché local.
Dans ce contexte réglementaire foisonnant, un outil tel que le CPE a donc pleinement sa place. En effet, il permet pour les maîtres d’ouvrage de sécuriser des objectifs quantitatifs en termes de consommation énergétique. A l’heure où les différents textes établissent des plafonds cible, un tel cadre est donc particulièrement adapté !
L’ONCPE : un organisme d’analyse des CPE
Depuis 2016, l’Observatoire National des CPE, composé par l’ADEME, le Cerema et le CSTB se penche sur les caractéristiques des CPE français. Après deux premières publications parues en 2017 et 2019 et concentrées sur les CPE signés par le secteur public, l’ONCPE s’est associé à l’Observatoire de l’Immobilier Durable pour analyser les pratiques des acteurs du secteur privé en la matière.
Selon les seuils légaux applicables, les CPE sont répertoriés dans les avis et résultats de marché du Bulletin Officiel des Annonces des Marchés publics : ce sont notamment à partir de ces avis que l’ONCPE a reconstitué depuis 2016 l’historique des contrats mis en place.
Figure 1 : Historique du nombre de contrats mis en place Source : ONCPE, 2021
Concernant les contrats souscrits par les acteurs du secteur privé, le recensement s’avère plus délicat. C’est la raison pour laquelle l’OID contribue pour la première fois à cette édition des chiffres-clés. En effet, l’association collecte depuis 2012 les données énergétiques et environnementales de bâtiments de propriétaires et gestionnaires et les rassemble au sein d’une base de données qui contient à présent une centaine de champs d’informations sur plus de 23 300 bâtiments et 54 millions de mètres carrés en France. Cette base permet de publier tous les ans des indicateurs énergétiques et environnementaux de référence, en fonction de différents critères identifiés comme ayant un impact sur la consommation énergétique des bâtiments (localisation, énergie utilisée pour le chauffage, certifications, période de construction, surface, etc.).
C’est dans le cadre de ce travail de collecte qu’un premier recensement des CPE a été organisé, afin de pouvoir donner une vision d’ensemble des CPE du pays, et de souligner les points de convergence et de divergence entre secteur public et secteur privé.
Le secteur privé souscrit des CPE tout en ménageant leur flexibilité
Quelles leçons tirer de ce premier exercice d’observation des CPE du secteur privé ?
Premier constat : il reste encore beaucoup de marge de développement aux CPE dans le privé. Pour cette première année, 108 contrats souscrits par 6 contributeurs ont été analysés. Pour autant, de nombreux acteurs disent ne pas connaître suffisamment les CPE pour les déployer à grande échelle.
Deuxième constat, les maîtres d’ouvrage du privé restent soucieux de ménager la flexibilité de ces contrats. Ainsi, si dans le public, un seul contrat de CPE peut concerner des dizaines voire des centaines de bâtiments (par exemple l’ensemble des collèges d’un département donné), dans le privé, les contributeurs appliquent exclusivement la règle d’un CPE par bâtiment. En effet, alors que le secteur public s’inscrit par définition dans une détention longue durée, les bâtiments des acteurs privés sont des actifs gérés de façon beaucoup plus dynamique. De ce fait, les actifs doivent être cédés de façon plus simple.
Autre divergence entre le secteur public et privé : alors que la durée moyenne des CPE du public s’établit entre 8 et 10 ans, les durées des CPE recensées sont beaucoup plus courtes. Un certain nombre d’acteurs privilégient des contrats d’un an, quitte à renouveler les contrats avec des caractéristiques actualisées par la suite.
Une telle structure de contrat explique également le choix principal envers les « CPE services », qui regroupent les actions dites « à faible investissement » visant la gestion, la régulation et l’optimisation en exploitation des équipements énergétiques.
Figure 2 : Répartition des CPE entre CPE services et CPE globaux Source : ONCPE, 2021
A l’inverse, dans le recensement des CPE publics, ce sont les « CPE systèmes » intégrant des travaux portant uniquement sur les systèmes énergétiques et les « CPE globaux » (associant travaux sur le bâti, travaux sur les systèmes énergétiques et actions d’optimisation et d’exploitation) qui sont privilégiés. Près de 9 contrats de CPE sur 10 prennent en effet l’une de ces deux formes dans le public.
Enfin, il est intéressant de noter que des CPE peuvent être mis en place sur des immeubles récents, et disposant d’une voire de plusieurs certifications, en exploitation comme en construction/ rénovation.
Les Contrats de Performance Énergétique se déclinent sous diverses formes selon les stratégies visées par les acteurs et leurs contraintes spécifiques. Sous l’impulsion de la réglementation à venir, il devrait donc continuer à se déployer plus largement au sein des parcs de bâtiments français. En attendant, il reste pour les acteurs du privé une façon efficace et rentable d’amener l’immeuble à son optimum d’exploitation au moyen d’investissements mesurés.
Pour retrouver l’édition 2021 des Chiffres-clés de l’Observatoire National des CPE, cliquez ici.
Le replay du webinaire du 9 novembre 2021 présentant les chiffres-clefs est disponible à ce lien, et le site de l’ONCPE est accessible à cette adresse : http://www.observatoirecpe.fr/