Une mobilisation générale des acteurs est indispensable, qu’il s’agisse des collectivités, de l’État, des entreprises ou des citoyens, pour préserver et restaurer la nature et la biodiversité. La nouvelle Stratégie nationale pour la biodiversité, soumise à consultation le 20 juillet 2023, sert de lien entre les différents secteurs.
Cette stratégie s’ajoute à plusieurs documents et stratégies importants, notamment un volet de la Planification écologique, présentée par la Première ministre Elisabeth Borne le 18 septembre, « Mieux préserver et valoriser nos écosystèmes ». Tous les secteurs sont concernés par la préservation et la restauration de la nature, y compris le secteur du bâtiment.
La mise à jour par rapport aux précédentes stratégies
La stratégie nationale pour la biodiversité 2030 vise à aligner les objectifs de la France avec le cadre mondial de la biodiversité adopté lors de la COP 15 en décembre 2022, et à poursuivre l’engagement de la France en faveur de la biodiversité. Elle trace la voie à suivre pour atteindre les objectifs à l’horizon 2050 définis par ce cadre mondial, et couvre la période de 2022 à 2030. Cette stratégie succède à deux précédentes stratégies qui ont respectivement couvert les périodes 2004-2010 et 2011-2020.
La structure de la nouvelle stratégie a été simplifiée. Elle comporte désormais 39 mesures, organisées autour de quatre axes :
- Réduire les pressions exercées sur la biodiversité
- Restaurer la biodiversité dégradée partout où cela est possible
- Mobiliser l’ensemble des acteurs
- Garantir les ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs
Chaque mesure est accompagnée d’une fiche dédiée qui précise le ministère ou l’opérateur responsable, les objectifs et la description de l’action, les indicateurs de suivi, ainsi qu’une trajectoire.
Le Gouvernement prévoit de décliner la SNB dans les territoires, sous la coordination des préfets, en synergie avec les Régions. Celles-ci ont été désignées cheffes de file biodiversité par la loi de reconquête de la biodiversité de 2016 et sont à l’origine, en lien avec l’OFB, des onze agences régionales de la biodiversité (ARB) existantes. La SNB est placée sous la supervision du Secrétariat général à la planification écologique.
Plusieurs mesures concernent le secteur immobilier, que ce soit de manière directe ou indirecte
La mesure 16 cible spécifiquement le secteur du bâtiment : Accompagner le secteur de la construction pour réduire ses impacts sur la biodiversité.
Les actions décrites dans le cadre de cette mesure regroupent plusieurs initiatives, notamment la végétalisation des bâtiments, la construction, la réhabilitation, la restauration et la rénovation écologiques. De plus, elles incluent la formation et les partenariats relatifs à la biodiversité, notamment en ce qui concerne l’accueil des espèces dans les bâtiments et le recyclage des matériaux pour éviter les impacts importés.
Une des actions concrètes et notamment la publication du référentiel avec le volet biodiversité, pour les projets de construction neuve. Les résultats auront vocation à alimenter la prochaine Réglementation Environnementale pour le cadre bâti. En plus de la biodiversité, ce référentiel commun, prévu pour 2025, inclura notamment la gestion durable de l’eau et une mise à jour concernant l’empreinte carbone.
Le secteur est concerné par de nombreuses autres mesures qui abordent :
- L’utilisation des sols et la végétalisation des villes (mesure 2, 20, 21 et 25). La végétalisation des villes et des bâtiments joue un rôle clé en créant des corridors et des habitats pour les espèces dans les zones urbanisées, facilitant la migration des espèces ;
- La réduction de différents types de pollution (mesure 7, 8 et 9). Le secteur immobilier est un grand consommateur de matériaux et génère des déchets, ce qui entraîne des pollutions à différentes étapes du cycle de vie d’un bâtiment, notamment pendant la phase de construction. La pollution lumineuse est également liée à l’utilisation de l’éclairage dans les bâtiments, notamment les bureaux et les commerces ;
- Lutte contre les espèces exotiques envahissantes, qui revêt une grande importance lors des travaux, ainsi que lors de la végétalisation des villes et des bâtiments, en favorisant le choix d’espèces locales et adaptées (mesure 10) ;
- Renforcement des compétences écologiques grâce à la formation sur la biodiversité et à la sensibilisation des acteurs, des professionnels et des citoyens (mesure 34 et 35) ;
- Mobilisation des financements privés en faveur de la biodiversité (mesure 38) ;
- Réduire l’empreinte biodiversité et les « impacts importes » liés à l’approvisionnement en matériaux utilisés par le secteur (mesure 4) ;
- Accroître la transparence et prise en compte de la biodiversité dans les différents labels (mesure 30 et 31).
Les mesures, seront-elles suffisantes ?
Étant donné que les précédentes stratégies biodiversité ont eu peu d’impact et ont été peu suivies, la question se pose quant à la réussite de la nouvelle stratégie. Le bilan de la stratégie précédente (2011-2020), réalisé par l’Office français pour la biodiversité (OFB), montre l’insuffisance des actions et l’absence d’objectifs clairs. Avec la nouvelle fiche-mesure dédiée, le nouveau volet de la SNB tente de concrétiser les actions et les objectifs.
En ce qui concerne les financements, 1 milliard d’euros seront consacrés à la biodiversité en 2024, en cumulant le Fonds friches, le Plan eau, les crédits du Fonds restauration. A ceci s’ajoute une nouvelle enveloppe de 264 millions d’euros. Cependant, il n’y a pas de trajectoire financière établie au-delà de 2027.
Un enjeu plus général concerne notamment le manque de cohérence entre les secteurs qui contribuent à la dégradation de la biodiversité et la cohérence de l’ensemble des politiques publiques (agriculture, sylviculture, infrastructures). Il serait d’autant plus important de faire un lien et assurer une cohérence entre la SNB et la Strategie Nationale Bas-Carbone (SNBC), et la trajectoire de réchauffement de référence (TRACC). La nouvelle SNB reste à ce stade une « feuille de route », un document théorique qui manque de valeur réglementaire, dont les ambitions devront être respectées.
Actuellement, quatre instances (le Comité national de la biodiversité, le Conseil national de l’eau, le Comité national de la mer et des littoraux, et le Conseil national de la protection de la nature) avaient jusqu’à fin septembre pour rendre leur avis. Le plan définitif devrait être adopté prochainement, au courant de l’automne 2023. Elle servira de base pour toutes les actions qui doivent être menées dans tous les secteurs, y compris celui du bâtiment, afin d’adresser les menaces pesant sur la biodiversité et enfin parvenir à freiner l’effondrement du vivant. Pour cela, il faut assurer un suivi régulier et mesurer les actions et les résultats.