Après le report du congrès de l’UICN à Marseille et de la COP 15 en Chine, initialement prévus en 2020, 2021 devrait être une année phare pour la lutte contre l’érosion de la biodiversité. Ces grands rendez-vous internationaux, reprogrammés pour mai et septembre 2021, devraient permettre d’engager une stratégie cohérente de la part des acteurs politiques et institutionnels. Retour sur les principaux enjeux Biodiversité de cette nouvelle année.
Une année 2020 favorable au développement de la conscience écologique en faveur de la biodiversité
La prise de conscience autour des enjeux liés à la préservation de la biodiversité s’est accrue durant l’année 2020. Au-delà du débat autour de l’émergence du Coronavirus (l’origine du virus n’a pas été prouvée), la communauté scientifique s’accorde à dire depuis plusieurs années que les pressions sur la biodiversité favorisent les risques sanitaires. En 2019, l’IPBES (équivalent du GIEC pour la biodiversité), annonçait dans son rapport global : « Les zoonoses représentent une menace sérieuse pour la santé humaine, les maladies à transmission vectorielle représentant environ 17 % de l’ensemble des maladies infectieuses et causant près de 700 000 décès par an dans le monde ». En outre, de nombreuses personnes ont pris conscience pendant les périodes de confinement, de la biodiversité qui les entourent. On ne compte plus le nombre de personnes qui disent avoir découvert le chant des oiseaux, avoir aperçu des mammifères sauvages dans les villes, etc. Ces éléments ont initié ou confirmé une prise de conscience chez l’ensemble des acteurs publics et privés.
En outre, plusieurs rapports, comme la nouvelle édition de la Liste rouge de l’UICN qui identifie les espèces menacées et en voie d’extinction (31 nouvelles espèces entrées dans la catégorie « éteintes ») ainsi que le Rapport Planète vivante 2020 de WWF (déclin moyen de 68 % des populations de mammifères, d’oiseaux, d’amphibiens, de reptiles et de poissons entre 1970 et 2016) agissent comme des lanceurs d’alerte auprès du grand public.
De multiples rendez-vous internationaux prévus pour 2021
Avec le report, du fait de la pandémie mondiale de la COVID-19, d’un certain nombre d’évènements initialement prévus en 2020, l’année 2021 sera chargée. Et c’est dès le 11 janvier avec le One Planet Summit pour la biodiversité, organisé par la France avec les Nations Unies et la Banque Mondiale, que les discussions ont démarré. En rassemblant des chefs d’Etat et de gouvernements ainsi que des leaders d’organisations internationales, des institutions financières, des représentants du secteur économique et d’ONG, l’objectif était de créer des conditions favorables au développement d’un consensus ambitieux lors de la COP 15 à la Convention sur la Diversité Biologique. Cette dernière est prévue à Kunming (Chine), du 17 au 30 mai 2021, et se penchera sur le déroulement et les résultats de la mise en œuvre du Plan stratégique 2011-2020 pour la diversité biologique. La décision finale concernant le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 devrait y être prise. Après la publication d’une étude de l’ONU qui a établi en 2020 qu’aucun des 20 objectifs qui avaient été fixés suite à la conférence d’Aichi (2010) n’ont été atteints, l’enjeu est de taille, et beaucoup attendent de cette COP15 qu’elle soit pour la biodiversité ce que la COP21 a été pour le climat.
Le Congrès mondial de la nature de l’UICN, qui devait se tenir en 2020 à Marseille, a également été reporté à septembre 2021. Avec plus de 1400 membres participant à cet évènement, le Congrès mondial de la nature se distingue de la Convention sur la Diversité Biologique dans la mesure où il rassemble des acteurs publics mais également des acteurs de la société civile comme des ONG, des associations, des entreprises, des organisations publiques et para-publiques, etc. Par ailleurs 109 recommandations destinées à enrichir le support de décisions qui sera discuté lors de la COP 15 sur la diversité biologique ont d’ores et déjà été adoptées par les participants en novembre dernier.
Cette pluralité d’évènements atteste de la préoccupation grandissante de la communauté internationale pour les enjeux de biodiversité, en espérant qu’ils aboutiront à des consensus ambitieux.
Le secteur de la finance est de plus en plus sensible aux enjeux liés à la biodiversité
Les acteurs du secteur de la finance se saisissent également de plus en plus des problématiques de biodiversité. La Task-force on Nature-related Financial Disclosure (TNFD), initiée en 2020, aspire à développer des recommandations pour que les investisseurs puissent mettre en place un cadre de reporting sur les performances biodiversité. La TNFD va poursuivre ses travaux sur l’année, et les premiers éléments devraient être publiés dès l’été 2021. En outre, le cadre réglementaire s’enrichit également avec l’obligation de reporting sur les risques liés à la biodiversité dans le cadre de la loi Energie-Climat. Cette obligation concerne les investisseurs qui sont soumis à l’article 173 de la Loi pour la Transition Energétique et la Croissance Verte (LTECV). Par effet de ruissellement, et comme les attentes vis-à-vis des entreprises vont s’accroître, on peut s’attendre à ce que les acteurs économiques soient de plus sensibilisés à cet enjeu.
L’immobilier et le bâtiment sont directement concernés par ces enjeux
Le secteur de l’immobilier est directement concerné par les enjeux de biodiversité. De par son rôle dans le changement d’usage des terres et l’exploitation des ressources naturelles, ainsi que son importante contribution aux émissions de gaz à effet de serre responsables du changement climatique, il est indispensable qu’il prenne en compte les enjeux de biodiversité. En ce sens, l’année 2021 pourra elle aussi bel et bien représenter un tournant pour les acteurs du secteur. Le projet de loi qui doit faire suite à la Convention Citoyenne pour le Climat, rendu public début 2021, viendra poser un cadre légal à l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) qui avait été initialement formulé dans le plan Hulot (2018) et repris dans l’instruction du gouvernement du 29 juillet 2019. La stratégie européenne en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, de son côté a déjà fixé des objectifs relatifs à l’étendue des zones qui doivent faire l’objet d’un statut de protection ; l’objectif est d’atteindre 30% du territoire européen terrestre sous statut protégé d’ici 2030, et 10% sous statut strictement protégé. Le niveau de protection n’est toutefois pas précisé à ce jour, ce qui peut rendre complexe l’anticipation de ces objectifs par les acteurs (plus de détails sur les statuts de protection des espaces en cliquant ici).
Après une année 2020 qui a favorisé une prise de conscience générale autour des enjeux liés à la biodiversité, 2021 pourrait être l’année d’un engagement global des acteurs de tous horizons pour la lutte contre l’érosion de la biodiversité et la dégradation des milieux naturels. L’immobilier est directement concerné, et le changement de paradigme vers un nouveau modèle plus sobre doit impérativement prendre en compte cet enjeu.