Renforcer la coordination entre les acteurs de la ville pour valoriser les co-bénéfices liés à la biodiversité

Afin de valoriser les co-bénéfices liés à la biodiversité, la coordination entre les acteurs de la ville est nécessaire. Actuellement, cette coordination est limitée car ils interviennent à des échelles spatiales et temporelles différentes. Afin d’accompagner le plus grand nombre d’entre eux à la prise en compte des services rendus par la nature, l’initiative Biodiversity Impulsion Group de l’OID travaille au développement de référentiels de mesure des co-bénéfices, afin de servir de base de discussion commune entre les différents acteurs. Retour sur les premiers résultats de ces travaux, présentés fin avril 2023. 

S’appuyer sur le vivant : un levier indispensable face aux défis actuels

Selon l’ONU, 68 % de la population mondiale devrait vivre en ville d’ici 2050 contre 55 % actuellement. Ce phénomène démographique est d’autant plus important lorsqu’il est rapporté à l’évolution de la population mondiale qui devrait atteindre 9,7 milliards d’habitants en 2050. Face aux changements globaux causés par l’activité humaine (changement climatique, modification des espaces naturels, effondrement de la biodiversité, etc.), la résilience des villes est de plus en plus menacée. Dans la trajectoire actuelle de nos sociétés, il est nécessaire de se questionner sur la viabilité en milieu urbain. Le recourt aux solutions fondées sur la nature (SFN) est un levier permettant de répondre aux défis écologiques et sociaux actuels et futurs des villes.

En permettant à la biodiversité de se développer en milieu urbain, les usagers peuvent profiter de services écosystémiques rendus par la nature. Ces services de régulation, d’approvisionnement, de support et culturels, sont rendus possibles par les multiples processus et interactions des écosystèmes. Pour ne prendre que quelques exemples, reconstituer des écosystèmes fonctionnels permet de réduire les îlots de chaleur urbains, de réduire la problématique d’inondation par l’infiltration naturelle de l’eau, de lutter contre la pollution atmosphérique, d’augmenter le bien-être des usagers, etc. Toutefois, afin d’assurer l’apport de ces « co-bénéfices », il est indispensable de veiller à ce que les milieux restent fonctionnels d’un point de vue écologique, c’est-à-dire capables de perdurer dans le temps de manière autonome, et en interaction avec les milieux alentours. Cela passe par une attention portée sur le choix des espèces, les pratiques de gestion, l’agencement des espaces entre eux, etc.

Une coordination limitée par des échelles spatiales variées

Développer la biodiversité dans les projets immobiliers est un moyen de répondre à de nombreux enjeux de la filière et des usagers. Les acteurs qui font la ville (promoteurs immobiliers, gestionnaires de bâtiments, collectivités, aménageurs, etc.) appliquent leurs compétences à des échelles spatiales variées. Néanmoins, l’application de certains co-bénéfices comme la régulation du climat ou la gestion naturelle des eaux pluviales implique souvent une action à une échelle plus large que celle du bâtiment seul. Les acteurs de la ville doivent alors travailler ensemble afin d’assurer une cohérence territoriale. Le dialogue entre les différentes parties prenantes de la conception de la ville reste aujourd’hui lacunaire en ce qui concerne ces enjeux. Développer des stratégies de planification territoriale qui valorisent ces engagements et encouragent les parties prenantes à agir de façon concertée est donc indispensable.

En outre, il manque aujourd’hui une gouvernance à l’échelle du quartier qui proposerait un espace de dialogue entre les parties prenantes. Les conseils de quartiers, quand ils existent, associent les habitants à la gestion municipale mais n’intègrent pas les promoteurs, gestionnaires des bâtiments et exploitants, qui ont pourtant le plus de leviers pour agir. La création de nouvelles compétences pour ces conseils de quartier et l’intégration des acteurs de l’immobilier pourraient alors permettre d’initier une dynamique locale favorable à la biodiversité et à la valorisation des co-bénéfices générés.

Une passation encore difficile entre la conception et l’exploitation des bâtiments

La conception d’un nouveau quartier ou bâtiment relève d’acteurs différents de ceux qui auront à en gérer l’exploitation ensuite et l’habiter. Leurs enjeux sont donc différents. En conception, les enjeux liés à la consommation foncière vont être plus préoccupants que les problématiques de confort d’été et de lutte contre les îlots de chaleur urbains qui s’adressent plutôt durant l’exploitation du bâtiment. De même, les leviers à leur disposition ne sont pas nécessairement identiques. Créer un espace d’échange entre ces acteurs dès la phase de conception des projets doit permettre de mieux identifier les enjeux de chacun et de s’assurer de la pérennité des solutions mises en place dans le temps.

L’OID œuvre pour la réalisation de référentiels communs des co-bénéfices

Ces problématiques temporelles et spatiales nécessitent une coordination renforcée entre les acteurs afin de valoriser la portée des co-bénéfices rendus par la biodiversité. Pour contribuer à cette dynamique, l’OID travaille au sein de l’initiative Biodiversity Impulsion Group à la création de référentiels de mesure des co-bénéfices générés par la biodiversité sur un bâtiment et sa parcelle. Ces travaux ont pour objectif d’intégrer durablement la prise en compte des co-bénéfices dans les pratiques. Depuis 2022, un projet en partenariat avec des étudiants du Muséum National d’Histoire Naturelle a pour rôle de dresser un état des lieux de ce qui peut être mesurable en priorité, par qui et comment. Les premiers résultats de ces travaux de recherche ont été présentés le 21 avril dernier lors d’un webinaire public (replay disponible à ce lien) et peuvent être consultés sur le centre de ressource de l’OID.

La prochaine étape sera maintenant de transformer cette connaissance produite en outil opérationnel pour les acteurs de la ville, afin de leur proposer des référentiels communs comme base de discussion. Il sera alors possible de mesurer le niveau de co-bénéfices apporté par un bâtiment ou un projet grâce à l’outil BIODI-Bat sur la plateforme Resilience for Real Estate de l’OID.

La coordination entre les acteurs de la ville et de l’immobilier est l’un des principaux défis pour la résilience des villes de demain. S’appuyer sur un modèle urbain accueillant pour le vivant constitue le seul levier pour y répondre dans une démarche vertueuse et durable. Pour cela, changer de paradigme en réfléchissant le bâtiment non pas comme isolés mais en interaction avec un environnement extérieur permettrait d’améliorer la cohérence territoriale et valoriser les co-bénéfices liés à la biodiversité. 

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