Bien que la structure de l’OID et son périmètre de responsabilité soient on ne peut plus simples à définir et que le nombre de salariés ne complique en rien cet exercice, l’OID a pourtant rencontré des difficultés dans le calcul de ses émissions carbone. Pourquoi ?
La raison est sans aucun doute généralisable à l’ensemble des sociétés qui basent leur activité sur un travail essentiellement immatériel, ou du moins, où l’usage des outils numériques y est prépondérant. Comme vous le savez certainement, l’envoi d’un mail, une recherche internet ou encore le stockage de données sur un cloud émettent du CO2, notamment parce que les serveurs informatiques qui permettent ces actions consomment de l’électricité, de la surface, ont nécessité des matériaux pour leur construction, des transports pour acheminer ces derniers, de la maintenance, etc. Cela vous est sûrement familier si vous avez l’habitude de raisonner en termes de cycle de vie.
Voici les différents freins, qu’ils soient cognitifs, techniques, matériels ou liés à l’accessibilité que nous avons identifiés pour l’appréhension de cette catégorie d’émissions :
Un poste auquel on ne pense pas forcément
Lorsque l’on parle impact environnemental, on pense souvent à des facteurs comme : le nombre de ramettes de papiers achetées dans l’année, le nombre de gobelets jetables utilisés à la machine à café, qui, s’ils peuvent être importants et doivent être diminués, ne pèsent que très peu dans le bilan carbone d’une société. Il s’agit donc déjà de prendre du recul et de bien réfléchir aux spécificités de l’activité de votre société avant de se lancer dans un bilan carbone. En ce qui nous concerne, nous travaillons la plupart du temps sur ordinateur, une part importante de l’activité de l’OID se joue donc ici. « L’essentiel est invisible pour les yeux ».
Lister les différents usages informatiques, un travail sans fin
Une fois intégré le fait que nos activités informatiques émettent du C02, encore s’agit-il de lister les différents usages. Les premiers qui nous viennent à l’esprit sont bien souvent les mails envoyés, les recherches internet, le téléchargement de fichiers, les publications sur les réseaux sociaux, etc.
Mais avez-vous pensé au stockage de vos SPAM ? Au nombre de visites sur votre site internet ? A la quantité de retweet de vos publications ? A la différence entre recherche internet et recherche navigateur ? Au transfert de fichier via port USB ? Ou encore au temps de lecture de documents en ligne ? Lister les usages émetteurs des systèmes informatiques peut s’avérer une tâche longue et difficile, notamment parce que ces impacts sont mal connus.
Evaluer son usage informatique
Trouver le nombre exact de mails envoyés sur un mois ou une année est assez facile, cependant, connaissez-vous le nombre de destinataires, le nombre et le poids des pièces jointes, ou encore le nombre de jours où vos mails sont restés stockés sur votre boîte ? Ce sont des facteurs qui influencent grandement les émissions associées à l’envoi d’un mail. Aussi, pouvez-vous estimer le nombre de recherches internet effectuées sur un mois, une semaine, un jour ? Il s’avère assez compliqué d’estimer ce genre d’usages car la rapidité de nos technologies en ont fait des réflexes, qui ne sont pas forcément intelligibles ou considérés.
Bien que le bilan carbone soit un outil opérationnel, qui a de l’intérêt plus pour le plan d’action qui en découle que pour la finesse de ses calculs, il reste que ces usages informatiques ont un impact important du fait de leur quantité : un mail a un facteur d’émission de 4.00 E-3 kgCO2e selon l’ADEME, ce qui est négligeable, cependant si l’on multiplie ce chiffre par le nombre de mails envoyés et reçus, le bilan peut être considérable.
A la recherche de facteurs d’émission
Probablement le fruit d’une prise de conscience récente : il existe très peu de facteurs d’émissions précis et fiables concernant les usages informatiques. Vous pouvez toujours utiliser les facteurs disponibles (qui se résument concrètement à l’envoi d’un mail, la publication d’un tweet et une recherche internet), seulement ceux-ci ont un degré d’incertitude de l’ordre de 100%. De même, rien ne sert de demander des données à vos différents prestataires, celles-ci seraient pour le moment inexploitables. Par exemple, le concepteur de votre site internet peut sans doute vous dire avec précision le nombre de visiteurs de ce dernier, mais cela ne prendrait pas en compte les émissions liées au développement ou à la maintenance du site. La solution qu’il vous reste est d’utiliser des ratios monétaires de services (de télécommunication par exemple), souvent surévalués et trop généraux, afin d’estimer à partir de votre facture, le nombre d’émissions associées. Autant dire adieu à la rigueur scientifique.
Améliorer ses pratiques dans un monde ultra-connecté ?
Comme nous l’avons précisé, la plus-value de l’exercice du bilan carbone est l’élaboration d’un plan d’action pour diminuer ses émissions CO2. Alors, que faire ?
Comment améliorer ses pratiques dans un monde du travail où la plupart des échanges se font par mail (y compris à son voisin de bureau), où les productions en tout genre disponibles sur internet se multiplient, où les comptes-rendus des multiples réunions s’accumulent dans les dossiers « archives », où il est impossible de fixer un rendez-vous sans envoyer un invitation sur agenda électronique, où la réactivité attendue chez les salariés oblige à une utilisation accrue et systématique des recherches internet, où une entreprise ne peut guère se développer sans une présence sur les réseaux sociaux et un « community manager » pour s’en charger ?
Les bonnes pratiques sont difficiles à mettre en place car elles supposent souvent une refonte totale de l’organisation interne de la société, ou de changer complètement les logiciels utilisés pour plus de sobriété. Se conformer à un tel plan d’action pourrait même s’avérer être un risque pour la société qui pourrait s’exclure elle-même du marché, aujourd’hui dépendant et dynamisé par les outils informatiques et les nouvelles technologies.
Ce sujet, révélateur de nos modes de vie, mérite donc une attention toute particulière.