Le 10 mars dernier, une vingtaine de membre de l’OID ont eu l’occasion de visiter le site de l’Orfèvrerie, anciennes usines du coutelier Christofle qui constituent un ensemble d’anciens bâtiments industriels construits à la fin du XIXe siècle.
Accueillis par Sophie ROSSO, Directrice Générale des Opérations Groupe – QUARTUS (propiétaire du site), le groupe a tout d’abord pu découvrir l’ensemble du site de l’Orfèvrerie, qui accueille aujourd’hui près de 200 structures. La visite s’est terminée dans les locaux du collectif Re-Store qui nous a été présenté par Minh Man NGUYEN, Co-fondateur – WOMA.
Situés au bord du canal Saint-Denis sur la commune du même nom, ces bâtiments ont accueilli la production de l’entreprise Christofle de 1877 à la fin de l’activité sur le site en 2007. Des activités diverses de tournage et d’artisanat ont investi les bâtiments jusqu’en 2016, date de l’acquisition du site par le promoteur Quartus.
Faire vivre une friche industrielle par un projet d’urbanisme transitoire
Pour conserver l’activité dans ces bâtiments classés « monuments historiques », l’occupation temporaire a été privilégiée, en attendant la réhabilitation finale à venir. Au total, ce ne sont pas moins de 7000m² qui sont occupés par des artistes, scénographes, artisans, architectes, plateaux de tournage et même un traiteur solidaire, dans un lieu de mixité des activités favorisant les échanges et collaborations. C’est par exemple le cas de Neil Beloufa, artiste plasticien exposé au Palais de Tokyo ou au MoMA de New York, qui occupe un grand atelier de 900m² au cœur du site. À la suite d’une première saison concluante en 2018-2019, une seconde saison de baux est actuellement en cours.
L’occupation est gérée en association avec le collectif SOUKMACHINES, un « collectif hybride qui favorise les échanges artistiques » explique Sophie Rosso. Les grandes halles de l’usine et leur structure en poutres métalliques apparentes proposent des volumes très importants et sont utilisés pour des tournages, pour des événements ponctuels ou comme lieux de stockage.
Ancrer la filière du réemploi dans des projets concrets : le défi du collectif Re-Store
L’ancienne usine accueille aussi le collectif Re-Store, engagé dans la filière du réemploi pour expérimenter et développer des actions autour de la revalorisation des matériaux. Le collectif Re-Store participe à l’insertion de l’économie circulaire dans l’industrie du bâtiment via le réemploi des matériaux (essentiellement bois et plastique). Concrètement, le concept suivi est « Trash In, Product Out » nous explique Minh Man NGUYEN, c’est-à-dire récupérer des coupes de chantiers ou des déchets de déconstruction et éventuellement les transformer pour obtenir un matériau utilisable dans un nouveau projet. En fonction de la nature des matériaux, ils peuvent servir à fabriquer des structures, des aménagements intérieurs (cloisons, meubles) ou des revêtements extérieurs, par exemple. Leurs expérimentations mobilisent des compétences et des métiers de tous horizons : architectes, designers, ingénieurs, artisans, etc. pour « maîtriser l’intégralité de la chaîne de valeur de la filière du réemploi », de la conception aux finitions. Ce travail a abouti à différents projets, par exemple une structure temporaire en bois pour protéger une terrasse du soleil (8 tonnes de bois, dont 90% réutilisé !) ou encore la rénovation de façades pour la RIVP. D’autres projets à venir montrent la diversité des possibilités du réemploi : pour le village olympique des Jeux 2024, ce sont à la fois les cloisons intérieures temporaires en bois et les façades en pierre et métal dont la construction en matériaux de réemploi sont envisagés.
A l’Orfèvrerie, un espace de 1500 m² permet la cohabitation de toutes les spécialités du collectif, grâce à un atelier partagé que nous avons visité : là, les artisans peuvent mesurer les matières brutes récupérées de sources multiples puis les transformer en mobilier ou en nouveaux matériaux utilisables en construction. A cet atelier s’ajoute une ressourcerie de bois et des espaces de coworking… avec une décoration « faite maison », à partir de matériaux réutilisés !
Les anciennes usines Christofle sont mises en lumière par leur activité
Finalement, le choix de l’occupation temporaire est gagnant pour toutes les parties prenantes : d’une part, le promoteur fait vivre et met en avant un site qui ainsi n’est pas vide en attendant les autorisations de réhabilitation, et d’autre part c’est un environnement privilégié pour les occupants qui peuvent trouver des espaces dédiés à leur activité à moindre coût et dans un écosystème d’échange et de collaboration.
Par ailleurs, la vie sur le site en fait un lieu de visites, y compris au public lors de journées portes ouvertes, une fois par an !