Bâtiment RESILIENCE : comment concevoir un bâtiment sobre et adapté aux conditions climatiques de demain ?

Pendant la matinée du mercredi 27 octobre 2021, une vingtaine de membres de l’OID ont fait la découverte du bâtiment RESILIENCE de la Ferme des Possibles. Situé à Stains, au cœur de la Seine-Saint-Denis, le bâtiment abrite le siège de Novaedia, une coopérative de réinsertion professionnelle qui emploie et forme des individus aux métiers liés à l’agriculture urbaine, la restauration et la logistique. Ainsi, Novaedia met à disposition une ferme urbaine de 1 hectare et son bâtiment RESILIENCE où se trouvent un laboratoire de cuisine, une cafétéria, des espaces de bureaux, de coworking et des ateliers pédagogiques dans le but de dynamiser la collectivité.



Privilégier le réemploi des matériaux pour abaisser le poids carbone

L’un des piliers de RESILIENCE est la sobriété carbone. Ce principe a d’abord guidé la phase de construction du bâtiment, qui a duré 15 mois. En effet, il a été construit entièrement grâce à des matériaux géosourcés et biosourcés ou recyclés in situ. Pour la structure, les matériaux d’une tour obsolète aux alentours ont été réutilisés.  La structure est notamment en bois et les murs sont principalement en terre cuite recouverts d’enduit fabriqué à partir d’argile local ainsi que de matière provenant du recyclage des cartons de livraison du chantier.

Pour l’isolation, les matériaux privilégiés sont le bois, la terre, le chanvre et la paille compressée. Chaque matière a été employée de façon à capitaliser sur ses propriétés d’isolation thermique, anti-humidité et phonique naturelles. Enfin, afin d’aller au bout de la logique de sobriété en matériaux,  l’essentiel du mobilier, les fenêtres, la décoration, les plantes, les sanitaires ou même la plomberie de RESILIENCE ont été recyclés ou bien réemployés.

 

S’adapter aux aléas climatiques en mettant l’accent sur la low-tech

En outre, malgré une empreinte écologique maîtrisée, le bâtiment est particulièrement bien adapté aux aléas climatiques à venir. D’abord, RESILIENCE est un bâtiment bioclimatique, il a donc été conçu de façon à interagir avec son environnement immédiat pour extraire de celui-ci de la luminosité, de la fraicheur et de la chaleur dans le but de réduire son empreinte carbone et d’être plus résilient face aux changements climatiques.

Pour cela, le projet a fait appel à des solutions low-tech, notamment en s’inspirant de la conception des serres pour réchauffer naturellement le bâtiment et en intégrant un mur trombe afin de fournir de la chaleur en hiver et de la fraîcheur en été. Par ailleurs, pour optimiser davantage la consommation d’énergie, le bâtiment abrite une sorte de second bâtiment à l’intérieur tandis que les circulations sont disposées à l’extérieur. Ces espaces tampons permettent la circulation d’air frais dans les couloirs tout en gardant la chaleur dans le bâtiment central.

Pour renforcer l’effet de serre, RESILIENCE est sous forme d’une longère agricole orientée Nord-Sud, totalement transparente sur ses façades Sud et Ouest et est équipé d’une verrière sur le toit,  afin de tirer profit au maximum de la chaleur et de la luminosité du soleil, surtout en hiver. Pour faire face à des conditions météorologiques estivales en revanche, le bâtiment est doté de divers dispositifs pour limiter la pénétration de chaleur dont notamment des stores et des trappes manuelles. Pour intensifier cet effet de fraîcheur, les façades exposées au soleil peuvent être protégées aussi par une bâche isotherme et par de la végétation. Les façades Nord et Est sont, quant à elles, parfaitement isolées.

Ces innovations sont particulièrement utiles compte tenu des derniers modèles scientifiques du GIEC. En effet, d’après le scénario RCP8.5, il pourrait notamment y avoir en Europe des canicules tous les deux ans à partir de 2050 et des vagues de chaleur quasiment ininterrompues durant dix semaines. Cela va non seulement augmenter les températures intérieures, mais également mécaniquement entrainer une surconsommation énergétique en l’absence d’adaptation du bâtiment.  Par conséquent, il est impératif de trouver des solutions bioclimatiques low-tech afin de construire des immeubles résilients.

 

 

Le projet reste par nature expérimental

Le projet est toutefois couplé de technologie de pointe pour renforcer les qualités de la low-tech. Cette stratégie de complémentarité entre divers types de technologies est illustré par l’installation d’une thermo-frigo-pompe, qui récupère les calories générées par la production du froid pour assurer le chauffage et l’eau chaude du bâtiment. Cette pompe dispose d’une station météo, de capteurs installés dans tout le bâtiment et fait le suivi en temps réel de la consommation énergétique, afin de minimiser l’empreinte carbone. De plus, il est prévu d’installer prochainement un ventilateur de basse consommation pour améliorer la ventilation et ainsi produire encore plus de fraîcheur notamment en été.

En somme, RESILIENCE – comme d’autres initiatives disséminées sur le territoire – est le fruit de diverses expérimentations et évoluera certainement en intégrant de nouveaux outils et concepts. Le parti pris de mettre l’accent sur le réemploi des matériaux et la sobriété énergétique tout en proposant un bâtiment confortable et adapté aux aléas climatiques est inspirant ! Si toutes les innovations mises en œuvre ne sont probablement pas réplicables à grande échelle – les réglementations actuelles limitant leur exploitation et développement – ce bâtiment offre néanmoins un panel de solutions intéressantes et originales. 

 

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