« Lorsqu’on touche à l’extra financier, la récolte de données n’est pas encore quelque chose de complètement acquis, et les gens sont parfois étonnés du nombre de ressources que l’on demande, mais c’est en réalité une tendance qui ne fera qu’aller en augmentant car plus on avance dans la récolte de ces données, plus on prend conscience des enjeux qu’il y a derrière, des risques ainsi que des opportunités ce que cela représente. » – Alice Rimpot – CDP.
La Finance responsable prend de l’ampleur, et de nombreuses initiatives privées se développent afin de permettre aux entreprises responsables de valoriser leurs démarches, notamment face aux exigences de transparence imposées par les investisseurs. Le marché de l’immobilier s’inscrit dans cette tendance, et c’est la raison pour laquelle s’est tenu ce 24 Mars 2020 un atelier organisé par l’OID visant à dresser un état des lieux des différents référentiels internationaux de reporting ESG applicables au secteur de l’immobilier (GRESB, CDP et PRI) et en relever les évolutions importantes en 2020. Afin d’assurer un haut degré de pertinence, l’atelier a fait intervenir Alice Rimpot, Engagement Manager – CDP Europe, ainsi que Charles van Thiel, Associate – Real Estate – GRESB. Un enregistrement audio, avec le support de présentation de cet atelier est disponible ici.
Cet atelier était également l’occasion d’introduire le nouveau décryptage de l’OID « Cartographie 2020 des référentiels internationaux disponibles pour les acteurs de l’immobilier » disponible sur Taloen.
Le reporting extra-financier et la transparence, éléments clés de la finance responsable en immobilier
L’OID a introduit cet atelier avec une revue de l’actualité en matière de finance responsable. En effet, le contexte réglementaire actuel tend à se structurer et à promouvoir de plus en plus le reporting extra-financier comme un exercice obligatoire, au même titre que le reporting financier (à l’image de la Déclaration de Performance Extra-Financière pour les SIIC, la taxonomie européenne visant à établir un cadre commun des activités considérées comme vertes et la doctrine ISR de l’AMF mise en place pour encadrer les pratiques et permettre aux investisseurs non institutionnels de mieux prendre en compte les critères ESG dans leur décision d’investissement.
Le reporting extra-financier et la prise en compte de ces données dans l’élaboration de la stratégie d’entreprise constituent donc un enjeu de plus en plus important afin de continuer à attirer les investisseurs et se positionner comme leader sur les enjeux ESG. Pour les acteurs de l’immobilier, l’OID a identifié trois principaux organismes de reporting extra-financier : le GRESB, le CDP et les PRI. Au-delà de la comparaison entre les trois référentiels, l’atelier a été l’occasion pour les intervenants de rappeler la complémentarité de ces organismes de reporting.
Quelles évolutions pour le reporting du GRESB en 2020 ?
Lancé en 2009, GRESB est un organisme d’évaluation et de comparaison des pratiques ESG des acteurs immobiliers, permettant aux investisseurs immobiliers d’orienter leurs stratégies d’investissement. En 2019, plus de 1000 sociétés immobilières cotées ou fonds immobiliers privés se sont prêtés à ce reporting sous forme de questionnaire, et plus de 100 investisseurs institutionnels déclarent s’appuyer sur les données de GRESB dans leurs décisions d’investissement d’après GRESB.
Parmi les grandes évolutions du reporting framework de GRESB en 2020 : la structuration autour de 3 composantes. Une première composante Management, qui mesure la stratégie et la gestion de l’entité, les politiques et processus mis en place, la gestion des risques et les démarches d’engagement des parties prenantes. Cette composante détient des indicateurs au niveau de l’entité exclusivement. La deuxième composante Performance mesure la performance du portefeuille d’actifs de l’entité, en utilisant les informations collectées au niveau des actifs et du portefeuille, et convient à toute société ou fonds immobilier possédant des actifs opérationnels en exploitation. Enfin, la troisième composante Development mesure les efforts de l’entité pour traiter les questions ESG pendant les phases de conception, de construction et de rénovation des bâtiments. Deux nouveaux sujets sont introduits en 2020 pour la composante Development : Life-cycle Assessements ainsi que Embodied Carbon, en alignement avec les thématiques abordées par le CDP.
Le GRESB délivrera deux documents distincts en fonction des questionnaires répondus par le participant : le Real Estate Benchmark Report relatif à la composante Performance (score final avec 30% du poids de Management et 70% du poids de Performance), et le Development Benchmark Report relatif à la composante Development (score final avec 30% du poids de Management et 70% du poids de Development).
Quelles évolutions pour le reporting du CDP en 2020 ?
Lancé en 2000, le CDP est une organisation à but non lucratif qui engage les investisseurs, les entreprises, les villes et les Etats à agir pour construire une économie réellement durable, en mesurant et comprenant leur impact environnemental. En 2019, ce sont plus de 8400 compagnies qui ont répondu aux questionnaires du CDP, et plus de 500 investisseurs institutionnels et 100 trillions de dollars US qui se sont basés sur les données du CDP dans leurs décisions d’investissement d’après les informations du CDP.
Le CDP présente trois questionnaires différents : un premier sur le Changement Climatique, le plus largement répondu, un deuxième sur la sécurité de l’Eau ainsi qu’un dernier sur la Forêt, le plus récent. Le CDP propose également un programme « Supply chain », permettant aux acteurs de la chaine d’approvisionnement de solliciter leurs fournisseurs sur leurs performances environnementales. En 2018, CDP a intégré au questionnaire général des questions spécifiques à certains secteurs d’activité, afin d’adresser les enjeux spécifiques à ces secteurs.
Les nouveautés pour le questionnaire de 2020 sont très limitées, dans la mesure où le CDP est dans une période de stabilisation à la suite des changements majeurs entrepris en 2018. En revanche, de nouveaux secteurs d’activité relatifs aux activités immobilières ont été intégrés: construction, immobilier, propriété, etc. Les nouvelles questions spécifiques à ces activités portent principalement sur les émissions du bâtiment sur son cycle de vie, les émissions carbone intégrées (embodied emissions), le nette zéro émissions de carbone, ainsi que les investissements bas carbone.
Quelles évolutions pour le reporting des PRI en 2020 ?
Le troisième organisme étudié par l’OID et proposant un reporting extra-financier pour les acteurs de l’immobilier sont les Principles for Responsible Investment (PRI). Les PRI sont un réseau international fondé en 2006 avec l’appui de l’ONU regroupant des investisseurs et gestionnaires d’actifs de tous secteurs, avec pour but de promouvoir l’intégration des enjeux ESG dans la gouvernance des signataires. Ce questionnaire aborde surtout les questions de gouvernance. En Février 2020, les PRI référençaient sur leur site près de 3000 signataires, dont 245 français.
Le reporting annuel est obligatoire pour l’ensemble des signataires des PRI. Le questionnaire des PRI s’adresse à des entreprises de secteurs divers, mais le module « Property » est spécifiquement adressé aux acteurs de l’immobilier (bien qu’ils puissent également être concernés par d’autres modules). 219 investisseurs signataires ont répondu au module immobilier du reporting des PRI en 2019, dont 60 investisseurs institutionnels et 159 sociétés de gestion. Les PRI rendent public un Transparency Report contenant les réponses au questionnaire annuel des investisseurs, et transmettent de manière privée au répondant un Assessement Report, évaluation confidentielle mesurant les progrès réalisés d’une année sur l’autre et comparant le signataire à ses pairs. Depuis 2019, les PRI ont créé un document annuel de valorisation des meilleures pratiques (Leaders’ Group), relativement à un thème. En 2020, le Leaders’ Group est basé sur le reporting climatique.
La nouveauté pour 2020 réside dans le caractère désormais obligatoire pour le module de reporting climatique (les réponses restent cependant confidentielles). Enfin, les PRI prévoient une restructuration en profondeur de leur Reporting Framework pour l’année 2021. Les détails liés au nouveau questionnaire n’ont cependant pas encore été communiqués par l’organisme.
Enfin, pour conclure, les intervenants ont insisté sur l’importance de la démarche d’engagement avant tout, témoin de prise en main progressive des questionnaires et enjeux par l’entreprise, face au manque de ressources humaines allouées à ces démarches dans les sociétés.
Pour consulter le support audio : cliquer ici.
Pour consulter le décryptage : cliquer ici.