Le pouvoir transformateur de l’Utopie pour un secteur immobilier responsable

« S’affranchir des croyances et lois de notre époque pour faire partie de la minorité qui inventera un autre monde »

Le 1er octobre 2020 se tenait la conférence « Changer nos imaginaires pour une ville durable et désirable » au siège de la BNP Paribas Real Estate. L’Observatoire de l’Immobilier Durable et le Plan Bâtiment Durable ont eu le plaisir d’accueillir Sandrine Roudaut – Auteure, Editrice, Conférencière en tant que grande intervenante de la journée afin d’échanger sur notre pouvoir d’action individuelle pour les transitions environnementale et sociétale nécessaires. La rediffusion de cette conférence a eu lieu ce vendredi 20 novembre 2020.

 « Nous vivons en parallèle deux agendas, l’un est environnemental et l’autre sociétal » introduit Loïs Moulas – Directeur Général de l’OID pour cette matinée sur le rôle des imaginaires. 1,8°, c’est l’augmentation de température déjà constatée en France métropolitaine en 2019 et un déclin de la biodiversité bien réel dont s’alarment nombre d’organisations internationales. Ainsi, l’agenda des principales crises environnementales s’accélère. L’agenda sociétal, celui de la transition de notre société, saura-t-il le rattraper ? Si notre société fait preuve d’une grande capacité de résilience, force est de constater qu’il nous sera « nécessaire de jouer sur d’autres choses que les leviers normatifs et réglementaires ou technologiques en vue d’atteindre les objectifs de réductions d’émissions de GES et ainsi, de relever un des principaux défis du XXIème siècle ». Nos comportements individuels doivent changer. Comment rendre cette évolution, inéluctable, désirable si ce n’est en jouant sur nos imaginaires et nos désirs ?

 « L’Utopie a un lieu, c’est l’imaginaire, c’est là qu’elle naît ! » proclame Sandrine Roudaut. Portons plus d’attention aux utopistes, ils questionnent les choses, le monde et les font avancer. En effet, Sandrine nous dit que nous faisons face quotidiennement à 2 choix : celui de « faire partie de la minorité qui inventera un autre monde », en soulignant le côté stimulant de cette aventure ou celui de « faire partie de la majorité qui retient l’ancien monde ». Ainsi, elle fait un appel à s’engager dans la voie de l’utopie, à « s’affranchir des croyances de notre époque, des lois, s’affranchir des injonctions de son milieu, même familial ». Le levier de la fiction nécessite d’être utilisé, en témoigne son dernier livre – Les déliés (Editions La Mer Salée – Septembre 2020) ! « Nous manquons de mots à se réapproprier » et écrire des nouveaux récits représente une opportunité pour produire des nouveaux scénarios de vie et d’usage qui transformeront nos sociétés. Delphine LabbouzDocteure en psychologie sociale et environnementale complète le propos par son expertise en décrivant les recherches qu’elle a menées dans le cadre de sa thèse : « Comment mettre l’humain au cœur de la ville ? ».  Même constat, on assiste à un « décalage entre la parole et les actes : on a conscience de l’urgence climatique mais on ne fait pas ce qu’il faut », d’où l’importance « d’adopter une approche systémique : on a des individus, des groupes, des innovations et des interactions entre eux ». Les changements comportementaux reposent sur l’évolution des normes de société !

 En introduction de la table ronde composée d’acteurs de l’immobilier et de la ville, Gerard Degli Esposti – Président de l’OID  souligne « la volonté d’action du secteur ». Philippe PelletierPrésident du Plan Bâtiment Durable en appelle à la fraternité, « l’idée qui est la mienne est celle de traduire en pratique dans nos relations immobilières ce mot anglais du « care » qui peut être traduit en français par le ‘prendre soin’ ». Il est nécessaire d’impliquer les gens, de comprendre leurs besoins, mesurer leurs fragilités afin de traduire cela dans des habitats évolutifs adaptés et différenciés pour tous. Stéphanie MorioArchitecte associée co-fondatrice de l’agence Bond Society – nous parle de son besoin en tant qu’architecte d’être plus en cohérence avec ses valeurs individuelles, besoin qu’elle concrétise en créant un pôle de recherche au sein de son agence. En effet, pour « faire évoluer la réglementation, il faut agir en étant précurseur »,  par le recours à des matériaux innovants, en travaillant sur les nouveaux usages, etc…, en témoigne l’étude Homy Coliving Cohabiter parue en juin 2018.  Csongor CsukásDirecteur Général du Property Management de BNP Paribas RE souligne le rôle de la BNP en tant qu’employeur et en tant qu’acteur de l’industrie immobilière. Sur ces 2 dimensions, les exemples d’actions entreprises sont nombreuses. « Intégrer le côté humain dans la construction des bâtiments » et faire du bureau un « lieu de sens » aux yeux des collaborateurs du groupe, ce qui passe aussi par une amélioration des locaux et la création d’espaces collaboratifs qui influencent positivement le bien-être au travail.

Pour Alexandre JostFondateur et Directeur Général de la Fabrique Spinoza il est possible de construire aujourd’hui un autre récit qui s’appuie sur les « bienfaits du vivant ». « Quand l’on mesure notre « bonheur » instantané, l’on s’aperçoit que les endroits où l’on se sent bien sont les étendues d’eau et les forêts. » Ainsi, il introduit la notion de « sentiment océanique ». Pour lui, le secteur de l’immobilier a intérêt à imiter la Nature afin de contribuer au sentiment de bien-être des individus.

Pour conclure cette matinée, Bertrand de FeydeauPrésident de la Fondation Palladio revient sur le bouleversement provoqué par la crise sanitaire : « le printemps 2020 constitue l’entrée dans le 21e siècle, car l’humanité a réagi de façon neuve à cette pandémie. » Pour lui, l’ordre ancien des villes est aujourd’hui bouleversé avec l’arrêt total des activités, de quoi s’interroger : « Pourquoi tout s’est arrêté ? Et pourquoi le monde continue-t-il de tourner malgré cela ? ». Ainsi, il souligne l’importance du secteur numérique ayant permis d’assurer la continuité des services. Dans ce cadre, le numérique représente peut-être une « prolongation de notre société », nous permettant d’économiser le temps et nous invitant ainsi à imaginer une « Nouvelle Athènes » qui serait bâtie avec le temps libéré des hommes.

Cette conférence du cycle Immobilier & Prospectives de l’OID, s’inscrit dans le cadre de nos travaux sur le bien-être, le Low-Tech, le changement des comportements et le rôle des imaginaires.

Le support de la conférence est désormais disponible sur Taloen, le centre de ressources pour un immobilier responsable.

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