RE 2020 : quels sont les contours attendus du texte actuellement en préparation ?

Depuis la COP 21 et les Accords de Paris en 2015, un certain nombre de gouvernements du globe se sont engagés à s’impliquer pour limiter l’ampleur du réchauffement climatique à 2°C à l’horizon 2100. Pour une France qui se veut un modèle dans la poursuite de cet objectif, le secteur du bâtiment est crucial : il contribue à hauteur de 44 % aux consommations d’énergie et représente près d’un quart du total des émissions de gaz à effet de serre françaises.

 

Une nouvelle réglementation attendue à l’automne 2020

Dans ces circonstances et sous l’impulsion de la loi ELAN de 2018, une nouvelle réglementation a été annoncée pour succéder à la Réglementation Thermique de 2012, qui concerne la construction des bâtiments neufs : la Réglementation Environnementale 2020, ou RE 2020, dont l’entrée en vigueur aura lieu en 2021.

En amont de la RE 2020 a été mise en place depuis 2016 l’expérimentation E+/C-, pour « Bâtiment à Energie Positive et Réduction Carbone ». Elle consiste en un label séparé en deux indicateurs, Energie et Carbone, qui attestent des niveaux de performance environnementale du bâtiment respectivement sur l’aspect énergie positive et sur les émissions de gaz à effet de serre, les deux grands objectifs de la RE 2020. Un des objectifs majeurs de cette expérimentation est d’aider au calibrage de la RE 2020 en interaction avec les acteurs du secteur sur la faisabilité et les coûts liés à la réglementation.

A l’heure de l’écriture de cet article, le texte est encore en concertation et sa publication n’arrivera qu’à l’automne 2020. Cet article vise à faire un tour d’horizon des informations qui préfigurent le texte et les pistes dévoilées. Toutefois tant que la publication définitive n’a pas eu lieu, les contours du texte peuvent encore évoluer.

 

Un accent mis sur les performances énergétiques et le plafonnement des émissions carbone

La Directive Européenne (UE) 2018/844 du Parlement Européen et du Conseil du 30 Mai 2018 précise : « les Etats Membres veillent à ce que d’ici au 31 décembre 2020, tous les nouveaux bâtiments soient à consommation d’énergie quasi nulle ; et après le 31 décembre 2018, les nouveaux bâtiments occupés et possédés par les autorités publiques soient à consommation d’énergie quasi nulle ».

Placée dans la continuité de la RT 2012, la RE 2020 se veut ambitieuse sur la performance énergétique. Cette ambition est également en cohérence avec les dispositions de la Directive Européenne (UE) 2018/844, qui vise une consommation d’énergie quasi-nulle pour tous les bâtiments neufs à compter de 2021. L’objectif est clair : approcher le Bâtiment à Energie Positive, et donc… produire de l’énergie. En effet, la RE 2020 projette d’introduire la présence d’au moins une énergie renouvelable primaire en autoconsommation dans les bâtiments nouvellement construits. La nature et l’utilisation de cette énergie est multiforme : récupération de la chaleur, panneaux solaires, pour l’électricité, pour l’eau chaude sanitaire… En parallèle, la règlementation est aussi plus stricte sur la limite des besoins énergétiques qui est drastiquement réduite par rapport à la réglementation précédente, passant de 50 kWhep/m²/an à 12 kWhep/m²/an pour le chauffage. Les performances d’isolation sont mises en avant comme principal levier pour parvenir à des fonctionnements d’une telle sobriété énergétique.

Néanmoins, construire durablement ne peut pas se limiter à l’unique phase d’utilisation du bâtiment mais doit aussi intégrer la réflexion sur les émissions de gaz à effet de serre tout au long du cycle de vie du bâtiment. Pour s’y attacher, la RE 2020 imposerait un seuil maximum d’émissions de gaz à effet de serre à respecter dans la conception, basé sur une analyse du cycle de vie prenant en compte les matériaux, la phase de construction, l’intensité énergétique d’utilisation et la fin de vie. Pour le monde de la construction qui n’avait pas jusqu’alors de réglementation sur le carbone au sens large, il s’agit d’une avancée marquante.

En complément, les méthodes de calculs des émissions de carbone liées à l’énergie vont être modifiées dans cette nouvelle réglementation. En particulier, le ratio théorique d’émission de carbone pour l’électricité de chauffage devrait être abaissé à une valeur de 79 gCO2/kWh (il est en comparaison de 210 gCO2/kWh dans l’expérimentation E+C-). De même, le coefficient de conversion de l’énergie finale en énergie primaire de l’électricité serait abaissé à 2,3 contre 2,58 précédemment. Ces modifications devraient conduire à une valorisation du chauffage électrique dans la conception des projets. Face à cet arbitrage entre énergie française peu carbonée d’une part et chauffage électrique d’une moindre efficacité énergétique de l’autre, les réactions sont contradictoires.

 

Une portée élargie à d’autres thématiques environnementales

Si le terme « environnementale » est accolé à cette réglementation, c’est enfin parce qu’elle aborde aussi d’autres problématiques liées à la présence de l’humain dans l’environnement qu’il crée et dans celui qui l’entoure. Parmi elles, on peut par exemple citer la qualité de l’air intérieur qui implique un choix adapté des matériaux ou encore le confort d’été, critère récurrent lorsque les sujets de résilience et d’adaptation des bâtiments au changement climatique sont évoqués.

 

La ministre de la Transition écologique et solidaire, madame Elisabeth Borne a confirmé en janvier 2020 la plupart de ces grands axes suivis par la RE 2020. Les seuils seront probablement affinés, puisque les concertations avec les professionnels du secteur sont toujours en cours. En outre, ce sont ces mêmes seuils qui permettront à terme de calibrer les contours d’application en France de la taxonomie européenne. Cette dernière mène en effet une réflexion sur les enjeux d’atténuation et d’adaptation au changement climatique, et devrait établir un référentiel permettant aux acteurs financiers d’identifier et de valoriser les bâtiments les plus performants énergétiquement. Si la RE 2020 fixe l’objectif de neutralité énergétique pour les nouvelles constructions, celles-ci pourront alors être classifiées « vertes » sur les marchés financiers d’après la taxonomie européenne. Rendez-vous à l’automne prochain pour découvrir les dispositions finales du texte !

 

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