Qu’est-ce que la valeur verte d’un bâtiment ?

La notion de valeur verte est discutée par les professionnels du secteur immobilier depuis le début des années 2000. Si la prime sur le prix de cession d’un bien par rapport à un bien situé dans le même quartier en est un élément marquant, d’autres paramètres peuvent également enrichir le concept.

 

L’occupation d’un bâtiment est la condition préalable de sa valeur

Si la vacance ponctuelle d’un bâtiment ou d’une partie de bâtiment sont des évènements qui arrivent régulièrement, il n’en demeure pas moins que l’occupation d’un immeuble est la pierre angulaire de sa valorisation. Pour le dire plus simplement : un immeuble ne vaut que tant qu’il est utilisé !

C’est la raison pour laquelle certains éléments liés à l’occupation d’un bâtiment viennent directement contribuer à sa valeur. Parmi ceux-ci se trouvent : le montant de loyer signé entre locataire et propriétaire, la liquidité locative qui traduit la facilité avec laquelle les surfaces concernées trouveront (ou retrouveront) preneur, ou encore les mesures d’accompagnement qui consistent en des accords de franchise locative ou de financement de travaux négociés entre les parties.

Selon une étude menée par JLL au Royaume-Uni au printemps 2021, il a été observé que les loyers étaient en moyenne 10% plus élevés sur des biens présentant une certification BREEAM « Very good » au minimum. De la même façon, les taux de vacances s’établissaient à 7% en moyenne pour ces mêmes immeubles, tandis que les immeubles non certifiés situés dans la même zone affichaient des taux de vacances de 20% environ.

Ainsi, dans la mesure où le marché assimile certains niveaux d’exigence, reflétés dans les certifications, à des immeubles durables, l’occupation s’en trouve améliorée. En outre, les profils mêmes des locataires attirés par  ces biens considérés « verts » seront de meilleure qualité notamment en termes  de solvabilité et d’assise financière.

 

Prime ou décote : le décalage des standards de marché

Alors que les nouvelles exigences environnementales établissent un nouveau standard de marché, et redéfinissent les contours des immeubles dits « prime », la question se pose de savoir si la valeur verte consiste en une prime sur les prix de vente réalisés ou bien en une préservation de valeur face à une décote dite « brune ».

A l’heure actuelle, il est encore difficile de trancher sur cette question. En cause, un resserrement du montant des investissements en France. Selon les chiffres du troisième trimestre 2021 présentés par CBRE[1], le volume investi dans l’immobilier tertiaire est en contraction de 23% sur un an. Par ailleurs, les transactions se concentrent prioritairement sur les actifs présentant des qualités ESG attractives aux yeux des investisseurs.

Une leçon à tirer de cette situation est que les performances ESG d’un bâtiment de bureaux – notamment lorsqu’elles permettent d’éviter des travaux de remise en conformité dans les prochaines années – améliorent significativement sa liquidité transactionnelle.

 

La prise en compte des risques physiques : un enjeu à relever

Selon le Four Twenty Seven – entreprise californienne spécialisée dans l’estimation des risques liés aux aléas climatiques -, cité par Swisslife, 19% des surfaces de ventes et 16% des bureaux en France sont exposés aux risques d’inondations et/ou de montée des eaux. Ces chiffres viennent corroborer les constats faits par le GIEC notamment dans son dernier rapport en date du 9 août 2021 : la fréquence des évènements extrêmes et des aléas climatiques associés va significativement augmenter. La France s’inscrit dans une tendance globale tristement illustrée en Europe notamment par les inondations meurtrières de l’été 2021 en Allemagne et en Belgique.

Face à ces occurrences augmentées des aléas climatiques, les acteurs de l’immobilier vont devoir anticiper les risques et intégrer ces risques dans leurs calculs de valorisation. Pourtant, une étude de l’UNEP FI publiée en août 2021[2] vient tempérer l’impact que peuvent avoir les évènements climatiques extrêmes sur les valeurs des propriétés. Dans cette étude, l’observation des prix des biens dans des zones sinistrées aux Etats-Unis (par des aléas tels que des ouragans, des tempêtes, des feux de forêt, des inondations, etc.) montre qu’une correction à la baisse s’applique après la survenance de l’évènement, mais est résorbée environ 3 ans plus tard !

 

 

Si la définition multi-critères de la valeur verte reste simple à théoriser, son observation reste pour le moment difficile. Entre l’attentisme des vendeurs, l’aversion aux risques des financeurs et investisseurs, et la difficile prise en compte des risques climatiques à leur juste niveau, les défis à relever sont nombreux. Finalement, sur cette question, la solution sera peut-être à trouver du côté des contraintes réglementaires qui, en assumant une vision de long terme, et en affinant la prise en compte des risques climatiques, viendra accompagner les acteurs dans la prise en compte des facteurs de résilience de leur patrimoine.

 

[1] Chiffres investissement du T3 2021 

 

[2] Clayton, J.; Devaney, S.; Sayce, S. and van de Wetering, J. (2021) Climate Risk and Commercial Property Values: a review and analysis of the literature. UNEP FI available at – TBC

 

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