Que retenir du projet de trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique ?

S’appuyant sur l’expertise d’une équipe pluridisciplinaire sur le changement climatique et l’immobilier, et en consultation avec ses membres acteurs leaders de l’immobilier en France et en Europe, l’OID a répondu ce 15 septembre 2023 à la consultation publique organisée par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Le gouvernement consultait en effet les citoyens, acteurs économiques et élus locaux sur le projet de trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC), en vue de l’élaboration d’une stratégie nationale d’adaptation pour le PNACC 3.  

 

Cette consultation organisée de mai à septembre 2023, et ouverte à toutes et à tous, a posé 3 questions auxquelles l’OID a souhaité apporter des réponses, en ayant pris connaissance des documents relatifs à la TRACC (un document de référence et un dossier de presse) ainsi qu’à la Mission de parangonnage sur les politiques d’adaptation au changement climatique (rapport de décembre 2022, portant sur différents pays). La réponse complète de l’OID est téléchargeable ici, et les grandes idées mises en avant sont détaillées dans cet article.

Question 1 : La France doit-elle se doter d’une trajectoire de réchauffement de référence d’ici la fin du siècle pour pouvoir s’adapter, tout en poursuivant la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre en ligne avec les objectifs de l’Accord de Paris ?
Réponse de l’OID :
  • La France doit s’adapter au changement climatique en renforçant sa résilience face aux aléas climatiques. Une trajectoire de réchauffement de référence est nécessaire pour harmoniser la planification de l’adaptation à l’échelle nationale.
  • Il est nécessaire d’utiliser une référence internationale, de la même manière que les autres pays européens, pour cette trajectoire d’adaptation, afin de faciliter la comparaison entre les pays et d’éviter toute confusion, comme cela a été recommandé dans la Mission de parangonnage sur les politiques d’adaptation au changement climatique.
  • Poursuivre la réduction des émissions de gaz à effet de serre tout en s’adaptant est absolument nécessaire. Dans cet esprit la trajectoire d’adaptation doit prendre en compte des scénarios suffisamment pessimistes pour rester pertinente.

 

Question 2 : Que pensez-vous d’une trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation de la France (TRACC) dont les niveaux de réchauffement de référence seraient : +2 °C en 2030, +2,7 °C en 2050 et +4 °C en 2100 (France métropolitaine) ?
Réponse de l’OID :
  • La trajectoire de référence actuelle est trop optimiste pour assurer une planification stable de l’adaptation au changement climatique jusqu’à la fin du siècle. Il serait plus approprié d’envisager une trajectoire basée sur un « scénario du pire« , tel que le RCP 8.5 (ou SSP5-8.5) du GIEC, qui prévoit un réchauffement de +2,4°C en 2050 et +4,4°C d’ici la fin du siècle à l’échelle mondiale (limite supérieure probable de 5,7°C). Cette recommandation est notamment soutenue par la Mission de parangonnage, en particulier pour les investissements à long terme.
  • La trajectoire ne prend pas en compte les incertitudes scientifiques et les boucles de rétroaction climatiques, et elle ne permet pas de réajuster les objectifs, ce qui va à l’encontre du principe de l’adaptation nécessitant une réévaluation constante des mesures en réponse aux évolutions.

 

Question 3 :

La dernière question se sépare en 5 parties dont l’objectif est de déterminer la marche à suivre pour décliner la TRACC à toutes les échelles. Cette 3ème question porte sur :

  • Les outils et accompagnements techniques et financiers qui doivent être mis à disposition,
  • La pertinence d’une mise à jour des normes, référentiels et réglementations techniques ainsi que ces impératifs et freins de mise en place,
  • Les attentes sur les modalités de concertation,
  • L’intégration des plans d’actions au niveau des collectivités locales,
  • La portée de la TRACC comme outil d’adaptation des filières économiques.
Réponse de l’OID :
  • Pour permettre aux collectivités, aux acteurs économiques et aux citoyens de prendre en compte les actions anticipées et d’assurer leur résilience, il est essentiel de mettre en place des outils et un accompagnement technique et financier appropriés.
  • Il est nécessaire de mettre à jour les normes, référentiels et réglementations techniques, comme le suggère la TRACC.
  • Il est nécessaire de garantir une participation inclusive, ouverte et contraignante de l’ensemble de la population et de toutes les parties prenantes, basée sur des dialogues multiniveaux, intersectionnelles et intergénérationnels.
  • La déclinaison de la TRACC devra être faite en prenant compte des spécificités territoriales et sectorielles, en concertation avec les parties prenantes.

 

En conclusion, ce projet incarne une démarche orientée vers l’anticipation et l’OID salue la réorientation des politiques publiques visant à assumer la responsabilité de l’avenir face à l’urgence climatique et à l’érosion de la biodiversité. Une vision long terme est essentielle pour faire face aux défis du changement climatique et la stratégie d’adaptation doit prendre en compte des scénarios suffisamment pessimistes pour ne pas devenir obsolète en cas d’échec ou de modifications des politiques, ou de remise en cause des modèles scientifiques. Le scénario actuellement retenu dans la TRACC ne remplit que partiellement ces conditions. Également, il est impératif de prendre en considération l’ensemble des conditions de vie humaines, au-delà des considérations économiques, pour assurer une résilience au changement climatique. Il est également impératif que tous les territoires (continentaux comme ultramarins) soient pris en compte dans la planification nationale, conformément au principe d’équité territoriale. Quant aux modalités de consultation, l’OID a souhaité exprimer une préoccupation quant au manque de transparence du ministère en ce qui concerne l’impact de cette consultation et la prise en compte des contributions dans l’élaboration de la stratégie nationale d’adaptation.

 

Rédaction :

Ce document a été rédigé par Marie ANDRIEUX, Cristhian MOLINA et Gregory PRIME, sous la supervision de Sakina PEN POINT et Loïs MOULAS. Des membres de l’équipe de l’OID ont été sollicités en concertation interne, et à ce titre nous remercions Chloé BERTRAND, Sabine BRUNEL, Juliette DAIRE, Roméo JUGE, Pauline KAJL, Constance MAGNUS, Gaëlle PESCHOUX et Pauline VILAIN.

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