Le Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC) 3 vise à présenter une stratégie robuste pour préparer la France aux impacts d’un réchauffement climatique anticipé de +4°C d’ici 2100. Ce plan est conçu pour renforcer la résilience du pays face aux effets du changement climatique, protéger les citoyens, adapter l’économie, préserver le patrimoine naturel et culturel, et mobiliser l’ensemble de la société. Alors que la présentation de ce plan avait été éclipsée par l’actualité politique et ce malgré les mises en garde du Haut Conseil pour le Climat, le document vient d’être mis en consultation le vendredi 25 octobre.
Principes stratégiques du PNACC-3 : quelle adaptation en France pour les cinq années à venir ?
Le PNACC-3 s’appuie sur les progrès effectués sur la connaissance climatique ainsi que sur les leçons tirées des deux derniers plans et de la mise en place du Plan Eau et de la Stratégie Nationale Biodiversité. Ces différentes stratégies avaient notamment permis de mettre en évidence la nécessité de disposer de connaissances accessibles sur les impacts à venir du changement climatique, de prendre en compte des effets du changement climatique dans les outils de planification territoriale et de se douter d’instances spécialisés et de trajectoires de références. Le PNACC-2 en particulier avait révélé un besoin de mieux prendre en compte les risques liés aux infrastructures, à l’approvisionnement et aux conditions de travail.
Ce troisième exercice a permis d’identifier les axes stratégiques et objectifs de ce que devrait être l’adaptation en France pour les cinq années à venir.
Les principes stratégiques du plan sont les suivants :
- L’anticipation, avec des mesures basées sur une trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC) inscrite dans la loi : +2,7°C en France en 2050 et +4°C en 2100.
- La progressivité, avec la mise en place de mesures différenciées à court (2030), moyen (2050) et long terme (2100). Le plan contient ainsi des actions concrètes et immédiates.
- La recherche de co-bénéfices, favorisant des mesures qui combinent adaptation, atténuation des émissions de GES et protection de la biodiversité. Le plan met ainsi en valeur les solutions d’adaptation fondées sur la nature.
- La priorisation, pour choisir les actions en fonction des risques et des coûts collectifs. A court terme, les actions sans regrets seront privilégiées, et une adaptation incrémentale est plébiscitée afin d’éviter les mal-adaptations. Pour cette priorisation, la question est posée : « Que souhaitons-nous collectivement protéger, abandonner, changer pour nous adapter ? ».
- La mobilisation, pour engager toutes les parties prenantes dans une démarche collective et démocratique afin d’instiller une culture de l’adaptation dans l’ensemble de la société.
- Et la différenciation, pour adapter les mesures aux spécificités des territoires. En particulier, un accent est mis sur les Outre-mer caractérisés par leur insularité.
Objectifs et mesures du PNACC-3 : quelles conséquences pour le secteur du bâtiment et de l’immobilier ?
Outre les grands principes stratégiques, le PNACC s’articule autour de cinq axes, ayant tous des conséquences sur le bâtiment et l’immobilier. Ces cinq axes se déclinent en 52 mesures.
Protéger les Français
Ce premier objectif permet de remettre au centre l’objectif premier de l’adaptation : protéger les populations. Pour ce faire, le plan propose vingt mesures, dont la cartographie des risques climatiques pour anticiper et mieux gérer les crises. Il vise également à maintenir un système assurantiel abordable, permettant à tous les citoyens de se protéger contre les risques naturels. Par ailleurs, il s’agit de limiter les risques liés au cycle de l’eau et aux fortes chaleurs, en portant une attention particulière aux populations vulnérables et aux territoires ultramarins. Des mesures visent spécifiquement le secteur du bâtiment comme :
- La révision de règles et de diagnostics (notamment le DPE) pour intégrer systématiquement le confort thermique lors de la rénovation des logements,
- Intégrer un axe sur les solutions de rafraîchissement dans les CEE,
- L’amélioration de l’adaptation aux fortes chaleurs des logements neufs, via une révision des seuils de la RE2020 si ces seuils étaient jugés inadéquats par les études amorcées,
- L’intégration de la consommation en eau potable dans la RE2020, et des textes visant à la limité qui entreront en vigueur en 2028.
- L’appui aux réseaux de froids renouvelables via le fond chaleur,
- La mise à jour des référentiels des plans de préventions des risques naturels prévisibles d’incendie de forêts,
- Une plateforme numérique pour collecter les attestations de respect des pratiques constructives liées au RGA pour les maisons neuves afin d’étudier leur pertinence technique,
- Un plan national de lutte contre les inondations et la généralisation du Build Back Better,
- Une doctrine littorale à +4°C,
- L’adaptation du régime BTP intempéries,
- Des recommandations à destination en particulier des Architectes des bâtiments de France pour concilier la protection solaire et le respect de la qualité architecturale,
- Un soutien aux opérations d’aménagement exemplaires tant compte de l’adaptation au changement climatique.
Assurer la résilience des territoires, des infrastructures et des services essentiels
Ce deuxième objectif vise à intégrer les enjeux d’adaptation dans l’action publique territoriale, en adaptant les services publics et les infrastructures critiques. Le plan prévoit la mise en place de stratégies d’adaptation propres à chaque collectivité territoriale, intégrant les spécificités locales, et l’adaptation des services publics (continuité de l’enseignement, etc.) et des infrastructures critiques comme les réseaux de transport et d’énergie pour garantir leur résilience face aux aléas climatiques.
Une place importante est également accordée à la protection des ressource en eau et le plan confirme l’effort national de -10% d’eau prélevée d’ici 2030 annoncé dans le Plan Eau.
Adapter les activités humaines
Pour assurer la résilience économique et la souveraineté alimentaire, économique et énergétique de la France, le plan soutient les secteurs économiques vulnérables, tels que l’agriculture, la pêche, le tourisme et l’industrie du bois, en fournissant des outils d’adaptation. Il encourage également l’innovation pour répondre aux défis climatiques et déployer des solutions d’adaptation dans les filières économiques. Le document prévoit notamment de rendre progressivement obligatoire les plans d’adaptation au changement climatique dans les grandes entreprises à partir de 2025. Il prévoit également l’adaptation des aides et dispositifs en place pour accompagner les entreprises (par exemple le prêt vert).
Pour mieux évaluer les actions d’adaptation mises en place, le plan prévoit de lancer l’initiative : « 50 sites précurseurs de l’adaptation » afin d’assurer une meilleure diffusion des bonnes pratiques.
Protéger le patrimoine naturel et culturel
Le réchauffement climatique va impacter nos milieux naturels et notre patrimoine culturel. Le PNACC prévoit de mettre en œuvre des actions de conservation et d’adaptation pour protéger les services écosystémiques rendus par les milieux naturels. En ce qui concerne le patrimoine culturel, des plans d’adaptation sont élaborés pour les sites culturels, notamment ceux classés et inscrits au patrimoine de l’UNESCO, afin de préserver leur intégrité.
Mobiliser les forces vives de la Nation
Encourager une culture de l’adaptation dans toute la société est essentiel. Le plan prévoit la formation des salariés, la sensibilisation des entreprises, et la mobilisation de la jeunesse. Il développe une véritable conversation nationale autour de l’adaptation grâce à la consultation publique et aux débats territoriaux. L’adaptation est également intégrée dans les cursus de l’enseignement supérieur et dans la formation des agents publics pour généraliser un « réflexe » d’adaptation.
Le PNACC Version 3 est une feuille de route pour préparer la France à un avenir marqué par des changements climatiques significatifs, pour le secteur de l’immobilier et du bâtiment. Cela implique une adaptation proactive et continue des infrastructures pour garantir la sécurité, la résilience et le bien-être des citoyens dans un environnement en constante évolution.
Bien que le PNACC-3 soit assez complet dans la prise en compte des enjeux, il présente certaines limites. Les objectifs ne sont pas toujours accompagnés d’indicateurs précis ni de sanctions en cas de non-réalisation. Les questions de financement restent insuffisamment résolues, posant des défis pour la mise en œuvre des mesures proposées. La Trajectoire de Réchauffement de Référence (TRACC) est critiquée pour son manque de réactivité face à l’urgence climatique. La mise en œuvre effective des mesures est compliquée par la multiplicité des parties prenantes, ce qui peut ralentir les processus décisionnels et l’action. Les populations les plus vulnérables et les PME peuvent ne pas recevoir suffisamment de soutien, augmentant les inégalités. Bien que traités, les territoires ultramarins nécessitent plus d’attention et de mesures spécifiques adaptées à leurs réalités climatiques. Le plan ne traite pas de la problématique des migrations climatiques, qui deviendra cruciale dans les prochaines décennies.