Bouygues Construction livre sa recette pour diviser par trois l’empreinte carbone des bureaux
Le groupe a mis en place une démarche originale pour diminuer la teneur en carbone d’un bâtiment de bureaux neuf. Elle a été validée par Franck Boutté Consultants et réinterprétée par trois agences d’architecture.
Amélie Luquain
292 kg éq. CO2/m². C’est la promesse de Bouygues Construction qui dévoile son "Concept building" de bureau très peu émissif en carbone. De fait, le niveau atteint est particulièrement bas. L’indicateur Ic construction ici affiché est trois fois inférieur à l’empreinte carbone moyenne des bureaux en construction aujourd’hui, évaluée à 870 kg éq. CO2/m², sous le seuil 2024 de la Réglementation environnementale 2020 placé à 980 kg éq. CO2/m². Ce poids carbone est aussi 40 % inférieur aux objectifs du seuil 2031 de la RE2020 fixé à 600 kg éq. CO2/m².
Compacité, sobriété, biosourcés... et réemploi
Pour parvenir à de tels résultats, la major a mobilisé ses équipes pluridisciplinaires d’experts depuis mai 2022. Notamment le bureau d’études Elan, spécialisé dans l’ingénierie environnementale, ou encore We Wood, sa filiale dédiée à la construction bois, afin de mener sa chasse au carbone sur tous les lots. « Concrètement, les moyens développés visent à privilégier la compacité, l’économie de matière, l’utilisation du bois en structure, la mise en œuvre de matériaux biosourcés ou encore le recours à l’économie circulaire afin de trouver un équilibre entre sobriété et confort », liste Albin Dargery, directeur général délégué de Bouygues Bâtiment Ile-de-France. La faisabilité et la performance de cette démarche itérative ont été accompagnées et validées par l’agence de conception et d’ingénierie environnementale Franck Boutté Consultants, Grand Prix de l’urbanisme 2022.
Projets compatibles avec le climat en 2040
Le concept a pris corps dans les mains de trois agences d’architectures : NeM architectes, Martin Duplantier Architectes et Coldefy. « Chacune a éprouvé la démarche sur trois sites différents pour y proposer un projet de 5000 m² de bureaux, prêt pour la dépose d’un permis de construire », explique Albin Dargery. Contraintes supplémentaires : « les projets devaient se baser sur les prévisions climatiques projetées pour 2040 », poursuit le directeur.
Réemploi à tous les étages
En Ile-de-France, l’agence NeM mise sur le réemploi : à partir d’un bâtiment voisin en déconstruction, des éléments ont été identifiés pour construire le nouvel édifice. Sur une structure bois, 6000 vitrages ont été réemployés pour y encapsuler de la paille sur 26 cm. La façade est aussi composée à 75 % de châssis réutilisés sous forme de bardage et de caillebotis métalliques détournés en brise-soleil. À l’intérieur, ce sont les planchers en béton qui ont été réemployés. « Le principe consiste à se servir de leur inertie pour les transformer en radiateur en y faisant passer des tuyaux », explique Adrien Sanchez, responsable études de prix et RSE de Bouygues Bâtiment Ile-de-France.
La terre crue sous toutes sous forme
Dans le Nord de la France, Martin Duplantier Architectes fait la part belle à la terre crue. « Les imposantes façades est et ouest structurées d’une ossature bois sont remplies d’un complexe préfabriqué mixant terre crue et béton sur 60 cm », détaille Adrien Sanchez. Le volume du bâtiment en gradin permet de développer de grandes terrasses orientées sud qui permettent de chauffer les espaces en hiver tandis que les radiants sont maitrisés en été derrière les brises soleils afin d’éviter la surchauffe. Les concepteurs ont poussé la réflexion autour de la lumière naturelle avec un pourcentage de vitrage autour de 60 %, adaptés à la région d’implantation. A l’intérieur du bâtiment, ce sont des voutes nubiennes en pisé qui partitionnent le centre du plateau, afin de réguler l’hygrométrie tout en offrant des espaces chaleureux.
Patio bioclimatique
L’agence Coldefy a, quant à elle, dû trouver une réponse adaptée aux fortes chaleurs du sud-est. Pour réaliser son bâtiment de bureau en bois, les architectes se sont inspirés des riads africains. Le volume se construit ainsi autour d’un patio doté d’un plan d’eau et de végétalisation. Et sur le modèle des tours à vent, le courant d’air chaud qui va passer au-dessus du bassin va permettre son évaporation créant ainsi de la fraicheur alentour, qui viendrait irriguer les plateaux. Un rafraichissement par géothermie est aussi prévu.
Selon les calculs de Franck Boutté Consultants, les trois projets atteignent les seuils carbones 2031.
Surcoût de 10 à 15 %
« Déjà, des investisseurs se montrent intéressés », assure Albin Dargery, expliquant qu’il vaut mieux « investir dès maintenant plutôt que de voir la valeur de son actif se dégrader rapidement du fait d’une trop haute teneur en carbone ». Ici, le surcoût estimé est de 10 à 15 %.
Prometteuse, la démarche a aussi vocation à s’étendre au marché de la réhabilitation d’immeuble tertiaire. Les calculs sont mis en regard des objectifs porté par le projet de recherche européen Carbon Risk Real Estate Monitor (CRREM), qui se penche sur la question des rénovations énergétiques dans le parc immobilier existant. Albin Dargery l’avoue aussi, c’est également une façon de répondre à l’Observatoire de l’immobilier durable qui commentait dans nos colonnes en janvier dernier que « le rythme de décarbonation des bureaux reste décevant ».
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