La raréfaction de la ressource en eau exige une gestion et une sobriété accrues dans le secteur du bâtiment

Il est désormais impossible de l’ignorer : le changement climatique et la consommation d’eau exigent des mesures de sobriété dans chaque secteur, y compris celui du bâtiment. Avec un premier plan gouvernemental sur l’eau, 53 mesures immédiates sont identifiées pour une gestion résiliente de cette ressource de plus en plus rare.

Fig. 1 L’eau est-elle une ressource rare ?
Cet élément essentiel à la vie est omniprésent sur notre planète : dans l’atmosphère, les sols, les mers et les êtres vivants. Selon l’Institut d’études géologiques des États-Unis (USGS), 96,5 % de l’eau totale de la planète est salée et se trouve dans les océans, 0,9 % provient d’autres sources d’eau salée présentes dans les écosystèmes terrestres tels que les mangroves et les marais, et seulement 2,5 % de l’eau est douce. De cette eau douce adaptée à notre confort et à notre utilisation, 68,7 % se trouve à l’état solide dans les glaciers et les neiges, 30,1 % dans le sol, que ce soit dans les nappes phréatiques confinées ou non confinées, et seulement 1,2 % est disponible à la surface dans les rivières, les lacs et même sous forme de nuages.

L’état de sécheresse en ce début d’été 2023

Les conséquences de la diminution des précipitations se font sentir. En ce début d’été, la France accuse encore d’un trop grand déficit de recharge de ses nappes malgré des précipitations plus favorables au printemps. La sécheresse est déjà installée et menace de frapper encore plus fort que l’été dernier.

Selon le dernier bulletin national de situation hydrologique de juin 2023, la situation des nappes est insatisfaisante sur une grande partie du pays : 66 % des niveaux des nappes sous les normales mensuelles.  Au 1er juillet déjà 84 départements présentaient des mesures de restriction et 15 étaient sous vigilance.

Selon le GIEC, le changement climatique d’origine humaine a entraîné des changements détectables dans le cycle mondial de l’eau depuis le milieu du XXe siècle, et il devrait provoquer d’autres changements substantiels à l’échelle mondiale et régionale. Ces altérations incluent la fonte des glaciers, l’augmentation de l’évaporation des eaux de surface, l’intensification des événements de fortes précipitations suivies de longues périodes de sécheresse et de vagues de chaleur. Ces répercussions ont déjà un impact évident dans notre quotidien, et il est estimé qu’à aujourd’hui, la moitié de l’humanité souffre de pénuries d’eau pendant au moins un mois chaque année.

Le premier plan eau national désigne les mesures à appliquer au plus vite

Les conséquences touchent tous les secteurs d’activité, de l’agriculture à l’industrie, en passant par la production d’énergie et les usages domestiques. Pour éviter de revivre les pénuries d’eau rencontrées par de nombreuses communes l’été dernier, il est essentiel de préserver les ressources en eau.

Pour la première fois, un plan d’action sur l’eau a été présenté par le gouvernement le 30 mars 2023. Ce plan comprend une cinquantaine de mesures visant à promouvoir la sobriété dans l’utilisation d’une ressource de plus en plus limitée, avec pour objectif une réduction de 10 % des prélèvements d’eau d’ici 2030. Plus généralement, un plan de sobriété est demandé dès maintenant à tous les secteurs économiques.

Une des mesures déjà mises en place est le site VigiEau, qui permet de mieux s’informer sur la sécheresse et de connaître les actions à mettre en œuvre pour économiser l’eau.

Les conséquences pour le secteur de l’immobilier

Pour le secteur de l’immobilier, une des mesures du plan national sur l’eau est de réduire la consommation d’eau dans les bâtiments neufs dès 2024. De plus, la provenant des toitures agricoles (notamment des bâtiments d’élevage pour l’abreuvement des animaux) sera largement encouragée en vue de sa généralisation grâce à des aides des agences de l’eau, pour permettre sa valorisation et sa réutilisation.

Il est désormais nécessaire de repenser toute la chaîne de valeur de la gestion de l’eau dans le secteur du bâtiment. Cela inclut l’innovation et le recyclage de l’eau, qu’il s’agisse des eaux pluviales, des eaux grises ou des eaux usées. De plus, le plan sur l’eau vise à optimiser la disponibilité de la ressource en sécurisant l’approvisionnement en eau potable, en développant 1000 projets de réutilisation de l’eau d’ici 2027.

L’empreinte eau sera intégrée dans l’affichage environnemental, qui permet aux consommateurs de connaître l’empreinte écologique d’un produit ou d’un service, dès 2024. L’empreinte eau mettra en valeur l’usage de l’eau tout au long de la chaîne de valeur, y compris dans la production des matériaux et la gestion des ressources primaires. Les acteurs du secteur devront anticiper et prendre des décisions éclairées concernant leur consommation d’eau pour chaque étape du cycle de vie du bâtiment.

Parallèlement, il convient d’améliorer le stockage de l’eau dans les sols, les nappes et les ouvrages. Avec le manque de pluie, les sols, qui n’ont pas été correctement humidifiés, ont du mal à absorber l’eau. Pour relever ce défi, une gestion de l’eau à l’échelle de la parcelle est essentielle, mettant l’accent sur la favorisation de la perméabilité des sols et privilégiant les solutions fondées sur la nature (SfN), comme préconisées par les agences de l’eau. Cela se traduit notamment par la végétalisation des sols pour mieux infiltrer et réutiliser les eaux pluviales, ainsi que pour contribuer à créer des îlots de fraîcheur.

Nouvelles opportunités et solutions existantes à développer

La transition vers une gestion plus responsable de l’eau représente un défi, mais aussi une opportunité pour le secteur. Il est essentiel d’identifier les solutions appropriées à chaque phase du cycle du bâtiment, de la conception à la construction, puis l’exploitation et l’usage, et enfin la démolition ou réhabilitation.

En ce qui concerne l’extérieur des bâtiments, il est primordial de poursuivre des initiatives telles que la végétalisation des bâtiments et des espaces et la récupération des eaux de pluie. Ces mesures permettent également de mieux gérer les précipitations intenses, de plus en plus fréquentes, en prévoyant un meilleur stockage et une meilleure rétention de l’eau. La végétalisation et les sols perméables favorisent également le bien-être humain et l’accueil de la biodiversité.

Enfin, il est également nécessaire de se pencher sur la consommation d’eau à l’intérieur des bâtiments et sur la sobriété pendant la phase d’utilisation. Le plan sur l’eau désigne des mesures pour réduire la consommation d’eau, favoriser l’utilisation d’équipements plus économes et sensibiliser les occupants à une utilisation responsable de cette ressource précieuse.

Il est important d’identifier les solutions appropriées, et cette démarche relativement récente nécessite une identification des leviers et des freins spécifiques au secteur de l’immobilier. Pour ce faire, l’OID lance maintenant un nouveau groupe de travail sur l’eau, qui a pour but de rassembler les acteurs du secteur et d’identifier les solutions en prenant en compte le cycle de l’eau, le cycle du bâtiment, ainsi que la gouvernance et la gestion de l’eau. Cela contribuera à trouver des moyens pour mettre en place les mesures qui pourront répondre rapidement aux enjeux auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui.

 

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