Biodiversité, artificialisation des sols et projets immobiliers : état des lieux et perspectives

L’érosion de la biodiversité est, avec le changement climatique, un des enjeux majeurs de notre époque. Le secteur de l’immobilier est directement impactant et impacté par ces phénomènes conjoints. En tant que principal consommateur d’espace par le développement des projets immobiliers, il contribue à l’artificialisation des sols.

 

La récente création de l’Observatoire de l’Artificialisation des Sols (le 9 juillet 2019) a été proposée par le plan Biodiversité 2018 du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire (MTES). Elle fait référence également à l’Objectif de Développement Durable n°15 développé par l’ONU et la « feuille de route pour une Europe efficace dans l’utilisation des ressources » de 2011, dont l’enjeu est de stopper la dégradation des sols et l’augmentation des surfaces artificialisées. La publication de l’instruction du gouvernement en date du 29 juillet 2019 relative à la doctrine « Zéro artificialisation nette » reflète la préoccupation grandissante des pouvoirs publics concernant l’avancée de l’imperméabilisation des sols en France.

 

Le secteur de l’immobilier est directement concerné.

En effet, l’étalement urbain et les constructions éparses sont les principales causes de destruction des continuités écologiques nécessaires à la faune sauvage pour circuler. Par ailleurs, il participe à la destruction, à la fragmentation des habitats naturels et la disparition de la diversité des profils paysagers. Ces facteurs concourent de manière rapide et massive à l’érosion de la biodiversité en France, ainsi qu’au dérèglement climatique, comme le décrit le dernier rapport de l’IPBES. Sur les 8 millions d’espèces animales et végétales connues sur Terre, environ 1 million sont aujourd’hui menacées d’extinction. En outre, le prélèvement des ressources (comme le sable maritime, les granulats et l’eau pour la fabrication du béton par exemple) contribue à l’altération des services écosystémiques.

En fournissant des aliments nutritifs et de l’eau propre, en régulant les maladies et le climat, en contribuant à la pollinisation des cultures et à la formation des sols et en fournissant des avantages récréatifs, culturels et spirituels, les services écosystémiques constituent les avantages matériels ou immatériels que l’homme retire des écosystèmes. Bien que leur valeur soit estimée à 125 mille milliards de USD (Costanza, R. et al. Changes in the global value of ecosystem services. Global Environmental Change, 2014) au titre de ce que la nature nous fournit gratuitement (air, alimentation, eau, etc.), ces actifs ne sont pas pris en compte comme il se doit dans les décisions politiques et économiques, alors qu’ils contribuent à la stabilité économique et sociale de nos sociétés.

L’érosion de la biodiversité pourrait avoir à plus ou moins brève échéance un impact  sur la valeur des actifs immobiliers. « En tant qu’investisseur, la perte de biodiversité peut se traduire, à terme, par une perte de rentabilité de nos actifs. Par ailleurs, en tant qu’assureur, la biodiversité nous intéresse par son pouvoir de résilience. […] La bétonisation des rivières a un effet contre-productif face aux phénomènes d’inondation. », détaille Céline Soubranne, directrice RSEAXA dans un article de La Tribune en décembre 2019.

L’artificialisation des sols se définit donc comme « tout processus impliquant une perte d’espaces naturels, agricoles ou forestiers (ENAF), conduisant à un changement d’usage et de structure des sols ». Sur cette base, le dernier rapport de France Stratégie publié le 23 juillet 2019, estime à 20 000 hectares en moyenne la surface des terres artificialisées chaque année en France entre 2006 et 2016 (hors infrastructures de transport), et la tendance est à la hausse.

Même si le secteur de la construction de bâtiments tertiaires ne fait pas partie des premiers responsables de cet état de fait – les infrastructures de transport et l’étalement urbain par le logement individuel représenteraient 70% du total des surfaces artificialisées dans la Métropole du Grand Paris, d’après une étude publiée en 2018 par le Cabinet Deloitte – le dynamisme croissant du marché des bureaux  oblige à s’en préoccuper. Durant l’année 2018, 39,4 millions de m² de locaux non résidentiels ont été autorisés à la construction (Données et études statistiques de janvier 2019, disponibles sur ce lien).

 

Quelle implication pour les acteurs de l’immobilier ?

Dès lors, comment les acteurs de l’immobilier peuvent relever le défi du recul de l’artificialisation au regard de l’actuel développement des projets immobiliers ? La question se pose sous le prisme de la biodiversité, autant en termes de richesse biologique, d’équilibres écosystémiques à conserver, d’adaptation au changement climatique ; mais également en termes de disponibilité du foncier, de valeur des actifs immobilier et d’attractivité du bâtiment.

Afin de poursuivre la réflexion sur ce sujet, l’OID organise une conférence dans le cadre du cycle Immobilier & Prospectives le 5 mars prochain de 9h à 12h avec le Plan Bâtiment Durable. Le thème en sera : Objectif zéro artificialisation net et préservation de la biodiversité, une nouvelle donne pour les projets immobiliers ? Cette conférence fera intervenir notamment Vincent Mignerot, Auteur, chercheur indépendant dans le domaine des Sciences Humaines, et fondateurAssociation Adrastia ; Julien Fosse, Adjoint à la directrice du département développement durable et numériqueFrance Stratégie et Corinne Lepage, AvocateCabinet Huglo-Lepage et ancienne Ministre de l’Environnement.

 

Renseignements et inscription sur ce lien.

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