En fin d’année 2023, l’OID publiait le premier volet d’une série d’analyses dédiées à la valeur verte dans le secteur immobilier. Cette première publication était consacrée au lien entre enjeux assurantiels et évolution de la valeur immobilière. Depuis, de nombreux éléments sont venus alimenter l’actualité autour du risque climatique et de sa gestion par le secteur assurantiel. On fait le point.
Le risque climatique, de plus en plus prégnant
Le changement climatique a entraîné une augmentation significative des événements météorologiques extrêmes tels que les tempêtes, les inondations, les incendies de forêt et les ouragans. Ces événements peuvent causer des dommages importants aux bâtiments, ce qui a plusieurs impacts sur les enjeux assurantiels qui y sont liés.
L’augmentation de l’intensité et de la fréquence des évènements climatiques en France métropolitaine et dans les Outre-mer se traduit par une hausse importante et durable des coûts d’indemnisation des pertes matérielles, agricoles et d’exploitation. Et cette hausse n’est pas sur le point de s’arrêter. Selon France Assureurs les coûts liés aux catastrophes climatiques sur la période 2020-2050 devraient être deux fois supérieurs à ceux de la période 1989 – 2019. Au total cela représenterait 70 milliards d’€ de coûts additionnels au cours des trois prochaines décennies.
Le risque climatique n’est donc plus un bruit de fond, ou un enjeu de second plan. En 2024, toujours selon France Assureurs, le dérèglement climatique constitue la seconde principale mencace pour le secteur assurantiel, tandis que l’éventualité d’un évènement climatique exceptionnel arrive au cinquième rang.
Fig. n°1 : Cinq principaux défis pour le secteur de l’assurance et de la réassurance, selon ses acteurs. Source : France Assureurs
Un modèle à bout de souffle
Face à cette montée en puissance des risques climatiques, le modèle courant de couverture est à bout de souffle. En particulier la Caisse Centrale de Réassurance, garante de la stabilité du régime Cat Nat, n’est plus en mesure de faire face à ses coûts.
Pour y remédier, le gouvernement a pris une mesure visant à augmenter la cotisation obligatoire qui l’alimente : le taux de surprime appliqué aux contrats d’assurance dommages habitations et biens professionnels passera ainsi de 12% à 20% et celui des contrats d’assurance automobile de 6% à 9% à compter du 1ᵉʳ janvier 2025 – une hausse qui devrait s’en ressentir sur le niveau des primes d’assurance.
2024, une année pivot ?
Cette potentielle hausse des primes d’assurance liés à une matérialité toujours plus forte des risques climatique était un des aspects anticipés, fin 2023, par l’OID. Celle-ci était comprise dans l’évolution générale des coûts assurantiels. Mais il ne s’agit pas là des seuls impacts à provisionner puisque nous proposions un modèle d’actualisation qui devait aussi prendre en compte les coûts d’un potentiel sinistre ainsi que ceux liés aux efforts d’adaptation.
Fig. n°2 : Modélisation de l’impact des enjeux assurantiels sur la valeur. Source : OID
Or depuis le début de l’année, les exemples faisant face à ce type d’évolutions se multiplient. Selon l’Association des Maires de France (AMF) il y aurait entre 1000 et 2000 communes en France qui ont dû faire face à des résiliations de contrats ou à de fortes hausses des cotisations, au 1er janvier, dans le cadre des renouvellements de contrats. En parallèle, les inondations qui ont frappé le Pas-de-Calais ont créé des situations d’incertitude et de stress, quant au montant des franchises et aux délais d’indemnisations.
C’est l’ensemble du système de couverture des risques climatiques qui commence à grincer, les difficultés revenant inlassablement, et toujours plus sévères.
Vers une réforme plus large ?
Dans son étude sur l’exposition du parc immobilier aux risques climatiques, l’OID a estimé que, selon la trajectoire de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC), 46% du parc immobilier serait exposé à un risque très fort pour les inondations liées à des évènements de pluie extrêmes par exemple. Selon ces mêmes projections 72% du parc encourrait le même niveau de risque pour les sécheresses et les risques liés au retrait-gonflement des argiles.
Une réforme à la marge ne suffira pas, et c’est la conclusion du rapport « Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques », remis au gouvernement au début du mois d’avril. Celui-ci comprend 11 objectifs majeurs, visant à maintenir un système assurantiel protecteur, accessible et mutualisé entre tous les assurés.
Transformation ou inaction, quel que soit le cap choisi celui-ci aura des répercussions inévitables sur la valeur des actifs. Les acteurs du secteur immobilier ont à charge de les anticiper afin d’éviter une onde de choc.